Carole Ada Dah est certainement l’une des plus jeunes candidates aux élections législatives du 22 novembre 2020 au Burkina Faso. Cette étudiante de 22 ans est sur la liste du mouvement politique SENS (Servir et non se servir) à Bobo-Dioulasso. En décidant de descendre dans l’arène politique, la jeune Carole dit s’être préparée à braver les mauvaises langues qui ne voient pas d’un bon œil l’engagement d’une jeune fille en politique. Mais elle avoue être guidée par ses convictions.
La démarche agile, l’allure frêle, Carole Ada Dah est une boule d’énergie qui étonne ses interlocuteurs. Etudiante en 4e année de droit dans une université privée de Bobo Dioulasso, elle est membre de plusieurs mouvements associatifs, dont le réseau des filles leaders. « A l’université, je suis membre du bureau général des étudiants. Il faut défendre un programme pour espérer les votes des étudiants. Cette expérience universitaire a contribué à mon engagement politique ». Le goût pour la politique naît alors chez la jeune fille qui, forte de son expérience dans la vie associative décide de franchir le pas. Un choix soutenu selon elle par son père à qui elle fait a fait part de ses ambitions : « Il m’a dit de faire confiance en mes convictions et ça ira ».
Pour elle, il faut arrêter avec l’image de cette jeunesse qui passe le temps à critiquer les gouvernants, sans daigner prendre ses responsabilités en descendant dans l’arène politique. « Il y a des gens qui m’ont accompagné parce qu’ils ont vu en mon engagement, un acte audacieux parce qu’on dit que nous les jeunes, nous passons le temps à critiquer sans réagir. Même si ça ne donne pas cette année, c’est une expérience que j’acquiers. Mais il y a des gens aussi qui voient cela d’un mauvais œil parce qu’ils se disent qu’on n’a pas l’expérience. Mais je pense qu’on commence petit à petit pour être grand. A notre âge, on a besoin de se former, avoir des mentors ». C’est au mouvement politique SENS née au mois d’aout 2020 que la jeune fille décide de faire son baptême du feu en politique.
S’engager pour changer
Carole Ada Dah est consciente. La tâche sera ardue. Une femme en politique, de surcroit une étudiante, n’est pas une sinécure dans un contexte marqué par des pesanteurs socio culturels. « Les gens parlent derrière moi. Des gens cherchent à déstabiliser. Le sexe féminin est vu comme le sexe faible. On pense que ce sont les hommes seulement qui ont leur mot à dire dans un Etat. En tant que jeune fille et femme, je pense que cela doit changer. Ce sont les femmes qui majoritairement sont électrices, qui élisent les hommes. Mais elles ne se font pas assez confiance pour s’engager en politique parce qu’on est marginalisées ». Cette donne-là, la jeune étudiante veut la changer et tout commence par l’engagement. « C’est une lutte de longue haleine, il faut persévérer », se convainc-t-elle.
L’étudiante en droit des affaires et fiscalité fait un triste constat : la politique est considérée comme un milieu « sale », où les coups bas et autres pratiques malsaines sont courants. Elle croit fermement que les jeunes peuvent contribuer à changer cette image, pour peu qu’ils s’engagent. « J’exhorte mes camarades jeunes à s’intéresser à la politique. Les jeunes se disent que les politiciennes sont des démagogues. Ensemble on pourra donner un nouveau visage à la politique. Permettre aux jeunes d’être dans les instances décisionnelles et s’affirmer (…) On ne peut prétendre chaque fois que les jeunes sont l’avenir du Burkina Faso, si on ne leur donne pas de place », clame la jeune candidate.
Faire la politique autrement
Pour ces élections législatives, Carole Ada Dah s’engage dans la bataille électorale avec ses camarades, d’une manière singulière. Pour eux, pas question de faire des promesses à tout vent et irréalistes aux électeurs, dans la seule optique de bénéficier de leurs votes. « A SENS, on n’a pas d’argent à donner, pas d’achat de conscience à faire. On veut des gens honnêtes qui vont nous suivre, On ne veut pas d’un bétail électoral. Nous apprenons aux jeunes à pêcher au lieu de leur donner du poisson. C’est un travail qui ne s’arrêtera pas après les élections. Quels que soient les résultats, nous continuerons le combat », martèle la candidate de 22 ans qui dit continuer son apprentissage en alliant études et politique.