La main gauche a une symbolique lourde. Elle dépeint la négativité, la malchance et est un signe du mal en Afrique selon des idées préconçues. La tradition moaga par exemple veut qu’on mette des gourmettes assez lourdes aux poignets des enfants qui ont des prédispositions à être gauchers. Elle veut également qu’on leur attache la main gauche dans le dos pour les contraindre à utiliser la main droite. Le témoignage de Nicole Arlette Hien.
L’image reste toujours gravée dans ma mémoire comme si c’était hier. Lors d’un déjeuner dans un restaurant bien connu du quartier Pissy, un quartier de Ouagadougou, il y’a quelques mois, alors que pour moi, il est tout naturel de tenir ma fourchette avec ma main gauche, un monsieur qui se tenait non loin de notre table s’est senti gêné. Il nous a rejoint et m’a demandé de changer de main. Parce que pour lui, la main gauche est sale. Outre la gêne, la honte, j’avais le sentiment d’être stigmatisée. Très souvent, quand je tends un objet à quelqu’un, je dois veiller à le faire avec la main droite parce que c’est mal vu par la société de donner avec la main gauche. On me traite souvent d’impolie ou d’effrontée.
Comme moi, Olivier (de son nom d’emprunt) a subi cette discrimination. Il a été souvent puni par sa maîtresse d’école. « Tout petit, j’étais constamment surveillé par ma maîtresse d’école du fait que je sois gaucher. Elle n’admettait pas que j’écrive avec cette main. Elle me détestait juste pour ce fait. Elle me frappait tout le temps », se souvient-il aujourd’hui.
« A un moment donné elle m’a menacé de ne pas composer la première évaluation, si je n’écrivais pas avec la main droite. Mon père était obligé d’intervenir.Un jour, il lui a demandé si elle pouvait écrire avec sa main gauche. Elle a répondu par la négative et mon père lui a dit que j’expérimentais la même difficulté », poursuit Olivier.