Malgré les arrestations, les grèves continuent dans certains lycées. Des responsables d’établissements scolaires de Ouagadougou se disent néanmoins soulagés après le déferrement de plusieurs élèves au parquet pour perturbation des cours. Leurs camarades se disent inquiets.
Matinée d’explications au lycée Philippe Zinda kaboré, le plus grand établissement public de la capitale burkinabè. Le proviseur a une discussion houleuse avec un parent d’élève et une association de scolaire. Evariste Kyélem le premier responsable de l’établissement a renvoyé un élève dont le père est venu plaider la cause. « Je ne vais pas revenir sur ma décision », tranche le proviseur. « Il a raté 5h de cours sous prétexte qu’il s’organise pour empêcher les grévistes de perturber les cours. Ce n’est pas de son rôle. C’est pourquoi j’ai convoqué son parent ce matin », explique-t-il.
Depuis le début du mois de décembre, les cours sont perturbés à Ouagadougou du fait de la grève des élèves. Dans un communiqué publié le 9 décembre 2020, le procureur du Faso parquet Ouaga 1 annonçait que « plusieurs personnes essentiellement des élèves scolarisés et des jeunes déscolarisés âgés de 15 ans à 18 ans ont été déférées » à la Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou (MACO). Le procureur Alain Yoda rappelait que des groupes d’adolescents parfois cagoulés, à motocyclettes ou à pieds, à coups de jets de pierres sur le toit des salles de classes et de sifflets, sillonnaient des établissements scolaires afin de faire sortir leurs camarades élèves pour des manifestations sur la voie publique en dehors de tout cadre légal.
Une décision sans impact ?
Une annonce qui a soulagé Evariste Kyélem pour qui, il était temps de mettre fin à ce désordre. «Quand on voit des élèves munis d’armes blanches pour empêcher leurs camarades de suivre les cours, c’est grave », s’offusque le proviseur. Au-delà de la perturbation des cours, une nouvelle forme de violence est en train de s’installer, une porte ouverte à toutes sortes d’agressions et de dérives qui pourraient avoir de conséquences néfastes, alerte-t-il.
L’air triste, Mme Coulibaly, une parente d’élève se met à la place des parents dont les enfants ont été mis sous les verrous pour faits de grève. « Ça fait très mal d’apprendre des choses sur son enfant. Ça fait très mal de voir son enfant derrière les barreaux. Ça fait très mal de voir son enfant rater des cours », dit-elle en soupirant. Elle invite par ailleurs le gouvernement à résoudre ce qui est à l’origine des grèves.
Mme Zongo, censeure du lycée technique de Ouagadougou apprécie, quant à elle, la décision du procureur. Par contre, elle craint que cela ne soit à l’origine d’autres perturbations. « Est-ce que l’arrestation des élèves n’ouvre pas une autre voie aux grèves ? Tant que les élèves seront emprisonnés leurs camarades ne continueront -ils à grever ?», se demande-t-elle.
Steeve Ouédraogo, élève dans un lycée privé de la capitale par contre n’est pas content de l’arrestation de ses camarades. « Les élèves sont solidaires et ils pourront continuer les grèves pour demander leur libération », prévient le jeune apprenant. L’annonce de l’arrestation des élèves n’a pas refroidi les ardeurs des jeunes grévistes. Ce 10 décembre 2020 par exemple, les cours ont encore été perturbés dans certains établissements comme le lycée technique de Ouagadougou.