Rapatriés de la Tunisie, au mois de mars 2023, des jeunes Burkinabè se sont retrouvés du jour au lendemain sans rien. Ils avaient tout vendu pour tenter l’aventure tunisien. Ils sont revenus les mains vides. Pour eux, l’immigration clandestine est sans issue, teintée de larmes et d’humiliation. Rachid, Moussa et Ismaël entendent alors à travers une association, travailler à dissuader les candidats à arpenter les sentiers sinueux de la clandestinité.
Comme beaucoup de jeunes de son âge, Abdoul Rachid Bancé, 29 ans, gérant d’une boutique de cosmétiques, rêvait d’aventure. Pour cela, il a dû fermer. Il vend ainsi son commerce, ce qui était son gagne-pain, pour se rendre en Tunisie. Il s’est même endetté pour financer son projet. Le rêve tourne très vite au cauchemar.
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Tout comme Abdoul Rachid, son compagnon d’infortune Moussa Sawadogo a également mis la clé sous le paillasson pour tenter l’aventure. Le jeune homme a cru à tout ce que lui avait fait miroiter un ami sur cet exil en Tunisie. « J’ai un ami en France qui a des guideurs et des coxeurs qui font rentrer des jeunes en Europe après paiement. Lui, il m’a menti qu’en Tunisie la paie journalière peut atteindre 25 mille F CFA. Je me suis dit que c’est une bonne affaire ».
« Il y a beaucoup de gens à qui ils ont menti qui se sont retrouvés là-bas »
Ce rêve tant vanté par son supposé ami pousse alors Moussa, jeune couturier, à vendre son matériel pour tenter le voyage. Moussa faisait également le commerce des bazins qu’il faisait venir de Bamako. « C’était bien! », se rappelle-t-il. Mais, il réalise bien après qu’il a été induit en erreur. « Il m’a mis dans la tête qu’on peut gagner entre 20 mille et 30 mille en travaillant de 8h à 14h en Europe », dit-il, avec amertume.
Une fois en Tunisie, Moussa déchante. « J’ai su ce que ce n’est pas ça. Il y a beaucoup de gens à qui ils ont menti qui se sont retrouvés là-bas », regrette Moussa.
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Pour cette raison, la voix presque nouée, il soupire : « Je ne conseille même pas à mon pire ennemi d’aller en aventure de ce côté. J’ai des amis qui sont tombés en route. Moi-même, je peux dire que c’est parce que mon jour n’est pas encore arrivé, sinon, je suis tombé sur la route », raconte-t-il. Il est sauvé, dit-il, grâce à un guideur qu’il considère comme un homme de Dieu.
Pourtant, ce voyage lui a coûté 1 million 25 mille F CFA. Avec cette somme, reconnait-il, il aurait pu mieux se réaliser ici au Burkina Faso.
Ismael Nango lui était chauffeur dans une entreprise privée. Afin de mieux se réaliser, il décide de démissionner pour prendre le chemin de l’aventure. Il regrette aujourd’hui ce choix : « Il y a beaucoup qui pensent que la Tunisie, c’est comme l’Europe. Le Burkina vaut mieux que la Tunisie. Il faut être en Tunisie pour comprendre. La vie à l’aventure est dure », assure le rapatrié.
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Tirant leçon de cette mésaventure, Rachid, Moussa, Ismaël ont créé l’Association des Burkinabè rapatriés de Tunisie (ABRT). Ils espèrent ainsi contribuer à la sensibilisation de leur paire de rester au pays et aussi à « lutter contre l’immigration clandestine, mobiliser les jeunes d’Afrique noire à ne plus aller en aventure, mais à essayer de faire quelque chose ici, parce que ça vaut mieux ».
En rappel, les Africains au sud du Sahara ont été victimes en début d’année de traitements inhumains sur fond de racisme en Tunisie. C’est dans ce contexte que dans une note datée du 25 février 2023, l’Ambassade du Burkina Faso à Tunis a lancé une opération de retour des ressortissants burkinabè en Tunisie vers leur pays.
Boureima Dembélé