L’agroécologie comme moyen de résilience face aux changements climatiques. Pour faire face à la dégradation des sols et la baisse de la pluviométrie qui réduisent les productions agricoles, des paysans ont décidé d’aller à l’école de l’agriculture écologique.
Dans le champ de Théodore Bazié à Goundy, une bourgade de la province du Sanguié, une dizaine de personnes s’affairent sous le soleil. A l’aide de houes et de pelles, ils dessinent un demi-cercle dans le sol, déblayent et puis forment un monticule sur un côté, laissant un creux. Il s’agit de la demi-lune, une technique culturale pratiquée dans certaines zones arides. Elle consiste à créer des bassins de rétention d’eau qui favorisent l’infiltration et réduisent l’érosion du sol. Avec cette technique, les sols dégradés reprennent vie.
Yaya Paré, débout, observe et donne souvent de la voix pour orienter et corriger. Ce formateur fait partie des promoteurs de l’agroécologie au Burkina Faso. Les techniques qu’il enseigne aux paysans sont adaptées à leur contexte. Au paysans de choisir ce qui leur convient. « Quand vous construisez les demi-lunes, les ouvertures doivent se faire face pour éviter que l’eau de pluie coule et s’échappe », explique-t-il de sa forte voix.
Cette technique culturale est adaptée à leur contexte. « Il y a des gens qui ont de grandes superficies mais le sol est devenu une terre nue, rien ne pousse là-dessus. C’est là que vous allez amener ces demi lunes pour récupérer les sols en utilisant aussi des fumures organiques. Tout cela va vous permettre de faire face en même temps à la pression foncière ».
La technique des zaï
Autre pratique culturale enseignée, le zaï qui est fait de petits trous creusés dans le sol. Il y a quatre types de zaï selon Yaya. Il s’agit du zaï simple, le zaï amélioré, le zaï rectangulaire, le zaï triangulaire. A Ces quatre types, il cite également le zaï mécanique. « Mais ça [zaï mécanique] ce n’est pas tout le monde qui peut le faire », prévient-il néanmoins. Pour les quatre autres types, il les considère plus pratiques pour les paysans.
« Les zaï améliorés sont adaptés à un sol très dégradé. Les zaï plus simples, vous le privilégiez lorsque la terre est toujours vivante car ça permet d’économiser la matière fertilisante. Mais les zaï améliorés vont vous permettre de travailler dans le même poquet pendant trois ans en utilisant au moins un kilogramme de fumure organique bien décomposée », précise-t-il.
Lire aussi: Les rêves de Azaël, jeune passionné d’agro écologie à Réo
Face au changement climatique, ces techniques culturales sont considérées comme un moyen de dialoguer avec la nature et s’adapter à ses caprices. Dans un deuxième temps, elles permettent d’accroître la production agricole dans les zones arides. Selon SOS Sahel, près de 34% des terres du territoire national, soit environ 9 mille 200 hectares de terres agricoles, sont dégradées avec une progression à environ 105 mille à 250 mille ha par an, ces dix dernières années.
Augmenter les rendements
Ali Ky, la vingtaine, originaire de la province du Nayala fait partie de la dizaine d’apprenants. Le jeune homme fait un constat apeurant : « Dans la province du Nayala, il arrive des moments qu’il y a une diminution de la pluie. Cette année par exemple, nous avons un retard d’un mois ». Une situation inquiétante donc pour le jeune agriculteur peu habitué à ces caprices de la pluviométrie. La province du Nayala est pourtant située dans une zone considérée comme l’un des greniers du Burkina Faso. « J’espère qu’avec le retour à l’agriculture écologique, on pourra augmenter nos rendements », souhaite-t-il.
Solange Sanou, chargée de projet à la Confédération paysanne du Faso (CPF), un regroupement de producteurs prônant l’agriculture familiale, est aussi convaincue que l’agroécologie peut aider à faire face aux changements climatiques.
«Ces techniques agroécologiques permettent de maintenir l’environnement sain. Ce qui va à l’encontre de l’utilisation des produits chimiques. Le deuxième avantage, c’est l’amélioration de la santé alimentaire et nutritionnelle. Le fait d’utiliser l’engrais organique permet de maintenir l’homme en bonne santé. Ensuite, les techniques agroécologiques permettent d’augmenter les productions agricoles surtout dans les exploitations familiales », convainc Solange.
Le souhait de la CPF, est l’extension de l’agroécologie à grande échelle pour aider le Burkina Faso à faire face aux changements climatiques et réduire l’insécurité alimentaire. Pour cela, selon Solange, il faut renforcer les capacités des paysans et valoriser leurs savoirs.
Boukari Ouédraogo