Certains quartiers de la capitale du Burkina Faso Ouagadougou accusent déjà le coup, des pluies successives de ces derniers jours. Des inondations sont constatées à Poessin, situé au sud de Ouagadougou, dans la commune de Komsilga. Des maisons écroulées, des effets à la merci des intempéries, des habitants dans le désarroi. Mais dans ce bidonville dont une partie est située dans une zone inondable, chaque saison des pluies arrive avec son lot d’inondation.
10 Août 2023 à Poéssin, quartier situé au Sud de la capitale. Il est environ 11h passées. Dans le quartier communément appelé non-loti, le constat est amer. Des vêtements de toutes les couleurs étalés sur les cordes, des ustensiles de cuisine éparpillés partout, des tôles entassées çà et là. Seulement retentissent des bruits de motos, tricycles. On peut également entendre de temps en temps le braiment des ânes attachés aux charrettes.
C’est dans cette ambiance de tristesse que nous rencontrons Adjaratou Rouamba. Vêtue d’un tee-shirt blanc, d’un pagne vert, un foulard noir bien noué, la sacoche en bandoulière, cette dame, la trentaine environ, nous conduit vers sa maison écroulée. C’est avec un sentiment d’impuissance qu’elle explique la situation. « C’est depuis lundi (Ndlr. 8 août) que la pluie fait des ravages ici. Depuis lundi jusqu’à ce jour nous n’avons même pas d’habits pour nous vêtir, pas de bidons, ni de marmites. La maison s’est complètement effondrée », soupire-t-elle, d’un air affligé.
La vie après le déluge
La mère de trois enfants ajoute que vue la situation, elle est obligée de parcourir des kilomètres pour avoir un moyen de déplacement. Ce qui n’est facile. « J’ai dû me rendre à Garghin (Ndlr. un quartier voisin) pour demander une moto afin de pouvoir ramasser mes affaires, on va faire comment, c’est triste, on ne sait même pas où aller », se désole Adjaratou, toute abattue.
La douleur ressentie par Adjaratou est partagée par une autre victime. Kassoum Nikièma, chef de famille dit être dans la détresse totale. Une vis et une pince à la main, l’homme est en train de démonter ce qui reste de son lit. Accroupi au milieu des décombres de sa maison, il dit être dépassé par la situation. « Dans cette partie de Poéssin, beaucoup de maisons sont tombées, il n’en reste plus rien », explique-t-il l’air dépité. Selon lui, plusieurs personnes sont parties de chez elles.
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« Elles sont nombreuses ces personnes qui ont déménagé dans la nuit du lundi à aujourd’hui suite à ces grandes pluies diluviennes », ajoute-t-il. Alors que nous continuons la visite en pataugeant dans la boue et marchant souvent sur des habits emportés par les eaux, nous rencontrons Salamata Compaoré.
Elle vient de quitter l’hôpital avec sa fille de 4 ans environ. Sur place, c’est le choc. Elle n’a plus où dormir. Sa maison a succombé sous le poids des eaux. Les larmes aux yeux, sa fille au dos, une marmite à la main, cette mère de 6 enfants dit avoir perdu espoir. « Pour le moment nous ne savons pas quoi faire pour nous en sortir. On n’a pas les moyens pour louer une maison, on n’a même pas de travail », raconte-t-elle, toute désespérée.
Où aller ?
Cette partie du quartier est située dans une zone inondable. Derrière les maisons écroulées, on peut même voir un canal d’eau non aménagé. Les habitants avouent connaître le risque qu’ils courent en restant là, mais disent n’avoir pas d’autres choix.
C’est le cas de Ismaël Zongo, qui réside là depuis 2018. Le jeune homme explique que Poessin connaît régulièrement des inondations, seulement elles causent moins de dégâts que celles de cette année. « Pour cette fois-ci là ça été pire. Ce n’est pas ici seulement que les maisons sont tombées, ça va jusqu’au barrage de Boulbi, ça dépasse 1 km », relate celui dont une partie de la maison s’est écroulée. Alors qu’il est en pleine discussion avec un maçon pour la reconstruction de sa maisonnée, Ismaël nous apprend qu’une dizaine de maisons ont cédé sous le poids des averses, sans causé de mort ni de blessé.
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Pour ce père de 3 enfants, il est difficile de quitter les lieux si tu n’es pas dans de bonne condition financière. « Si tu n’as pas de moyens, tu construis ce que tu peux seulement, si tu ne sais pas où aller ou si tu n’as pas un coin pour aller, c’est compliqué », analyse-t-il.
Vivre dans ce quartier précaire en plus dans une zone inondable est traumatisme pour les habitants, surtout à chaque saison des pluies. Les populations invitent les autorités à trouver une solution durable à leur cauchemar. En attendant, Salamata Compaoré après quelques heures à se demander où dormir, a bénéficié de la solidarité d’un voisin. Elle pourra passer quelques jours dans une maison qui a résisté aux intempéries avec sa famille. Et après ? Elle-même ne le sait pas, n’ayant aucun travail.
Carolle Kady Ouattara (Stagiaire)