Attente non comblée, discours creux, sortie calculée, déception. Au lendemain du discours du président du Faso Roch Kaboré, des jeunes s’expriment. Certains avouent être plus en colère après avoir entendu l’adresse du chef de l’Etat aux Burkinabè. Ils s’attendaient à des décisions fortes comme la dissolution du gouvernement ou un remaniement ministériel.
« Les gens sont encore plus remontés après avoir écouté le discours. Même les indécis se sont enfin faits une idée. On a l’impression que le président du Faso n’est pas du tout à la hauteur des responsabilités qui sont les siennes. On se demande s’il mesure vraiment l’ampleur de la situation ». Sayouba Dakissaga est en colère. Avant le discours du président du Faso, il avoue qu’il s’était pris à rêver, à espérer.
Au regard des attaques terroristes plus meurtrières et de la grogne montante, le trentenaire s’attendait à deux choses. « Je m’attendais à ce qu’il dissolve le gouvernement ou opère des changements au niveau de la hiérarchie militaire. Mais rien de tout cela n’a été fait. Je suis vraiment déçu de ce discours laconique », vocifère-t-il.
Cette colère et attente non comblée, le jeune enseignant Mohamed Compaoré la partage. Lui aussi avait nourri des espoirs. Bien qu’occupé à un mariage, il dit avoir consacré un peu de temps pour écouter le discours tant attendu. « Je suis déçu, sans vous mentir. Et je ne suis pas le seul dans cette situation. J’ai suivi le discours avec des amis, nous étions à un mariage. Mais n’ai pas vu une seule personne qui était satisfaite. Personne. Vraiment c’est décevant », lâche-t-il.
Pour lui également, la grande nouvelle attendue c’était un réaménagement ministériel. En lieu et place, les points abordés par le chef suprême des armées ne sont ni nouveaux, ni importants. « Il nous parle de la prise en charge des déplacés internes, mais il faut plutôt œuvrer pour qu’ils retournent chez eux », ajoute le jeune enseignant.
Assis sous un manguier à l’université Joseph Ki-Zerbo de Ouagadougou, un groupe d’étudiants devisent sur le sujet d’actualité. Certaines avouent n’avoir pas suivi le discours, préférant regarder le match de football de l’Euro. En année de master en Droit, Daniel Somda à lui écouter le discours. Plus modéré, il salue la sortie du chef de l’Etat. « C’est une bonne initiative que de parler à son peuple », dit-il. Mais la bonne note s’arrête là. Le reste, il déplore un discours sans âme et sans annonce de mesures « fortes ». « Il n’a fait que répéter ce qu’il disait auparavant. Je suis resté sur ma faim », disserte le jeune étudiant.
Une sortie calculée ?
Etudiant en année de licence en Sciences économique et de gestion, Palé Edouard est convaincu que le président du Faso aurait dû parler au Burkinabè au lendemain du massacre de Solhan. Le silence du président à l’époque a cristallisé davantage les déceptions, selon lui. Quant à Sayouba Dakissaga c’est la grogne naissante au sein des populations touchées par l’insécurité et au sein de l’opposition qui ont provoqué la sortie du chef de l’Etat.
« Si l’opposition n’avait pas annoncé des marches et que Titao et Kaya n’avaient pas marché, le président n’allait pas faire cette sortie. En écoutant son discours, on se rend compte que c’est surtout pour demander à l’opposition de surseoir à ses marches», analyse Sayouba pour qui, un simple communiqué aurait suffi.
Le jeune enseignant Mohamed lui dit avoir l’impression que Roch Kaboré s’est adressé à son peuple « comme si il défendait uniquement son fauteuil ». Daniel garde une lueur d’espoir et tempère. Pour lui, le chef de l’Etat n’a peut-être pas annoncé certaines décisions, au regard de la sensibilité de la question sécuritaire. Sayouba Dakissaga lui attend toujours un remaniement qui emportera les ministères de la sécurité et de la défense, d’ici le prochain conseil des ministres.
Dans son discours dans la soirée 27 juin 2021, le président Kaboré a entre autres demandé aux partis politiques et aux organisations de la Société Civile de surseoir aux marches et meetings annoncés. Il a en outre déclaré sa volonté de revoir l’emploie des Volontaires pour la Défense de la Patrie, d’améliorer la rapidité d’intervention pour les opérations aériennes et terrestres des FDS, de consolider l’efficacité, l’unité et la cohésion du commandement militaire.