Le Boubou Dagara, symbole d’une identité vestimentaire d’un peuple de la région du Sud-Ouest. La tunique en cotonnade et brodée est presque devenue une tenue nationale, porté dans tout le pays. Pour les plus âgés, ce boubou n’est plus comme ce qu’il était, il a connu des modifications à tel point qu’il n’est plus vraiment authentique. Pour les jeunes par contre, il faut bien une touche fraicheur pour qu’ils aient envie de le porter.
Moumouni Kayo, couturier est assis sur une chaise en bois, devant son atelier à Dissin, dans la région du Sud-Ouest. Une pile de pagnes Faso Danfani déposée devant lui. Sous le poids de l’âge, il ne coud plus. Il voudrait bien, mais avoue que ses yeux ne le lui permettent plus. De sa position, l’on entend le bruit incessant des machines à coudre.
La spécialité de Moumouni, presque sexagénaire, c’est la couture traditionnelle, notamment les boubous dagara. « Ce qu’on porte actuellement, c’est le boubou dagara mais ce n’est plus comme avant, comme nous l’avions connu. Le vrai djiwa (boubou dagara, Ndlr.), était fait à la main et sa confection pouvait durer cinq ans », dit-il, avec un brin de nostalgie.
Pour lui, il faut préserver l’authenticité du boubou dagara. Il reconnait que les anciens modèles sont certes plus épais, plus chers et exigent plus de travail. Les jeunes ne l’entendent pas forcément de cette oreille. Dans l’atelier du vieux Moumouni, des jeunes sont en pleine activité. Certains coupent, pendant que d’autres cousent. Salif Traoré, 27 ans travaille là depuis 5 ans et se spécialise aussi en couture du boubou dagara.
Autres temps, autres envies
Les modèles authentiques dont son patron Moumouni parle, il les connait bien. « Si on veut faire ce que le vieux nous a montré, pour vendre, ça ne sera pas évident, c’est trop cher. C’est plus compliqué. Si on doit coudre ça, on ne va pas vendre », se défend le jeune homme.
Pour les vendeurs aussi, les habitudes des consommateurs ont changé et il faut s’y conformer. En face de la gendarmerie de Dissin, Romain Poda y a installé sa petite boutique qui vend exclusivement des boubous dagara. Il a également sa petite idée sur le boubou authentique. « Les gens vont trouver que c’est vilain. La broderie d’avant et celle de maintenant n’est pas pareille. Les choses ont évolué, la technique a évolué », note-t-il pour sa part.
Le boubou dagara, d’hier à aujourd’hui
Avant ou maintenant, le boubou dagara a toujours la cote. « Le port du boubou procure une certaine fierté. Quand on coud ça et qu’un Dagara porte, lui-même sait qu’il a porté un habit », explique le vieux couturier. La situation n’a pas changé. « On porte ça et ça nous met en valeur. Un bon jeune s’il n’a pas payé, c’est qu’il n’a pas l’argent. Sinon un dagara doit porter ça », analyse pour sa part Romain Poda.
Si le boubou dagara est porté actuellement par vieux et jeunes, Moumouni se rappelle « qu’à leur époque », il n’était pas conseillé à un jeune, au risque de s’attirer des ennuis. « Vous trois qui êtes là, vous ne pouviez pas porter cette tenue en son temps. Il y a des secrets que je ne peux pas vous dire. On pouvait lui lancer un sort. En tout cas, on ne te laissait pas. Par contre, maintenant, il y en a à profusion et tous peuvent s’en acheter », ajoute le patron de Salif Traoré, impuissant.