Depuis quelques jours, certains élèves ont repris le chemin de l’internat, après les vacances passées en famille. Pensé pour permettre aux élèves ou étudiants d’effectuer leur scolarité dans des conditions de travail plus favorables, l’internat a marqué la vie de plusieurs anciens pensionnaires. Tous n’ont pas les mêmes souvenirs. Pour certains, ce sont les punitions et la sévérité des encadreurs, pour d’autres c’est la rigueur qui leur a permis de se discipliner à un moment donné de leur vie.
Les souvenirs se bousculent dans la tête de Guillaume Kéré quand il parle d’internat. La vingtaine, cet ancien pensionnaire du séminaire de Baskouré à Koupéla a passé 4 ans loin de ses parents dans cet internat religieux. Ce ne fut pas simple, avoue-t-il. « Tu imagines un petit garçon de 12, 13 ans ou 11ans dans cet environnement. Et dès notre arrivée il fallait déjà savoir travailler toi-même. Je me rappelle aussi qu’on a été puni pour bavardage et on devrait déraciner les herbes », se souvient Guillaume, nostalgique.
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Le jeune homme retient surtout cette valeur qui le guide jusqu’aujourd’hui : « ça nous permet d’avoir une certaine discipline dans la vie », dit-il, d’un ton qui marque une certaine fierté. Les bons souvenirs, c’est ce que garde également Vanessa Kindo, aujourd’hui étudiante en année de master. Elle a passé 3 années de sa vie en internat pour jeune filles à Koubri, commune située à la sortie Sud de la Ouagadougou.
La jeune fille s’empresse de rappeler que les débuts étaient faits de pleurs au quotidien. « Au début on pleurait parce que les parents nous manquaient et tout ça mais au fil du temps on s’est adapté. La vie à l’internat était tellement magique et magnifique pour moi. Et les souvenirs que je garde de l’internat sont très bons. Parce que là-bas j’ai connu pas mal de personnes, j’ai appris beaucoup », se souvient Vanessa, les yeux brillants de bonheur.
Bien plus que des études
Victorien Koala, est professeur de philosophie. Ancien de l’internat, il dit également garder comme héritage de cette époque : la formation à la discipline et aux principes de vie. « À l’internat j’ai reçu une formation humaine, intellectuelle, spirituelle qui a payé dans la vie active dans laquelle je me trouve présentement » déclare-il avec fierté.
Réservée et solitaire, Marie Paule Zombré reconnait avoir été transformée lors quand elle a été envoyée dans un internat. Selon celle qui est maintenant assistante dans une entreprise de communication, cette parenthèse de sa vie lui a appris à vivre en communauté. Au-delà de l’éducation et des résultats scolaires, c’est la formation de tout l’homme, insiste-t-elle.
« J’ai appris également à être indépendante parce que c’était loin des parents. Je me rappelle même qu’à notre 3eme, il y avait de ces filles qui escaladaient le mur souvent pour sortir aller faire leurs shows quand les supérieurs ont su, elles ont été renvoyées parce que le règlement intérieur interdisait ça » affirme la jeune fille.
Expérience à oublier
A chacun son expérience des internats. Kevin Kambou, instituteur à Ziniaré a carrément décidé de ramener sa fille à ses côtés, après qu’elle a été inscrite en internat. La raison : le manque de rigueur et son corollaire de mauvais résultats. «J’ai constaté qu’il n’y avait pas de rigueur et ses notes n’ont fait que chuter. Je l’ai même fait sortir aller passer le BEPC à l’externat et encore en classe de seconde quand je l’ai ramené à l’internat son niveau a encore chuté au point qu’elle redouble. Il n’y a même pas de contrôle parce que les portables sont même utilisés dans les dortoirs », déplore-t-il.
Ali Compaoré est proviseur d’un internat fille. Il explique que l’internat n’a pas seulement pour vocation la réussite scolaire. C’est aussi le lieu où les enfants reçoivent une éducation de base pour le savoir être et le savoir vivre. « Dans cet internat, nous n’avons pas vu seulement les résultats c’est vrai que ce sont les résultats qui prouvent que nous faisons quelques choses mais il y a une éducation de base qu’on donne. Les enfants viennent avec des caractères différents et on éduque », explique Ali Compaoré.
Safiatou Zong-Naaba (collaboratrice)