« Quand tu décides de faire le cinéma, on te demande d’abord si tu es mariée » Delphine Yerbanga, réalisatrice
Delphine Yerbanga, réalisatrice

« Quand tu décides de faire le cinéma, on te demande d’abord si tu es mariée » Delphine Yerbanga, réalisatrice

La réalisatrice Delphine Yerbanga a remporté le prix du président du Faso à la 27e édition du Fespaco avec son documentaire ‘’sur les traces d’un migrant’’. Pour un coup d’essai, Delphine vient de laisser des traces indélébiles dans le palmarès du Fespaco.

 

Delphine Yerbanga laisse déjà ses traces au Fespaco. Avec son long métrage « sur les traces d’un migrant » la réalisatrice décroche le Président du Faso d’une valeur de cinq millions de FCFA.  De la réalisation télé à la réalisation cinéma, il n’y a qu’un pas. Delphine vient de franchire ce pas avec sa première participation en tant que réalisatrice cinéma. « Il n’y pas une grande différence à la réalisation télé et cinéma. Mais il faut surtout maitriser le langage cinématographique comme les valeurs de plans, et bien d’autres », rappelle la jeune lauréate. Pour y parvenir Delphine s’inscrit à l’Institut supérieur des technologies de l’information et de la communication (ISTIC), puis à l’institut cinématographique du Niger à Niamey. Elle décroche un Master II en réalisation documentaire et de création à l’université Gaston Berger à Dakar avant d’être engagée comme réalisatrice  à la télévision nationale du Burkina Faso.

CVAV, le déclic !

Adolescente, Delphine aimait raconter des histoires imaginaires. Dans l’association cœur vaillant âme vaillante (CVAV), elle concrétisait ces histoires à travers des sketchs. «  J’accompagnai un groupe d’enfant et je devais écrire des scenarii pour monter les pièces de théâtre. Cela a énormément forgé mes capacités de réflexion et aiguisé ma plume », s’en réjouit-elle. La jeune dame ne rate surtout pas les projections des films à l’occasion des Fespaco à l’espace Gambidi. Chaque édition était une aubaine pour elle de nourrir sa passion pour le cinéma.

Le cinéma, un métier d’homme ?!

Les portes du cinéma restent encore étroites pour les femmes, déplore Delphine Yerbanga. Elle rappelle que l’idée du métier de cinéma réservé aux hommes est toujours d’actualité. La preuve, témoigne-t-elle : «  Quand tu décides de faire le métier du cinéma, on te demande si tu es mariée, quand tu dis non, on te dit d’aller te marier d’abord avant de venir parce que tu risques de ne plus jamais te marier ». Les femmes dans le cinéma portent toujours les griffes de stigmatisations, de clichés, d’idées reçues et erronées, regrette Delphine. Le manque de femmes cadreurs constitue également une difficulté pour les réalisatrices en ce sens où beaucoup d’hommes n’apprécient pas être diriger par une femme. «  Il faut être véritablement forte et se fixer des objectifs quand on est femme et qu’on veut exercer ce métier de cinéma », dit-elle.

-« Les traces d’un migrant »-

« Les traces d’un migrant » retrace l’histoire d’une jumelle que Delphine a rencontrée à Dakar au Sénégal. «  Elles m’ont demandées de les aider à retrouver leur père et de connaitre leur famille d’origine burkinabè qu’elles n’avaient pas encore vu », explique la réalisatrice. La migration- poursuit-elle est un phénomène qui couvre beaucoup d’histoires tristes et de désespoir. «  Quand un migrant oublie qu’il a fondé un foyer et qu’il ne pense plus revenir, c’est que la blessure qu’il porte est grand et profonde », relate Delphine qui a tourné le documentaire pendant quatre ans.