C’est comme si tout Poura fait de l’orpaillage. C’est le constat que l’on peut faire dans cette localité où selon les autorités locales près de 90% de la population a l’or au centre de ses activités.
L’histoire des mines et de l’or au Burkina Faso ne se raconte pas sans Poura. Cette localité a, en effet, abrité la première mine industrielle du pays. Elle a fait l’objet de titres miniers accordés à l’ex-Société de recherches et d’exploitation minière du Burkina (SOREMIB) créée en 1973. Mais l’exploitation de la mine de Poura s’est arrêtée définitivement en 1999 avec sa fermeture dans un contexte de chute du cours de l’or. La SOREMIB liquidée, Poura est alors tombé dans le domaine public minier.
Après des tentatives, la demande de permis d’exploitation industrielle de grande mine d’or de la Société Poura Gold Operation SA a été examinée et adoptée en Conseil des ministres du 3 mai 2023. Cette autorisation couvre une superficie de 32,59 km2 une production moyenne estimée à 11,74 tonnes d’or. Mais en attendant l’exploitation effective, ce sont les orpailleurs qui fouillent le sol, à la recherche de l’or. Et cela est fait avec une telle ampleur !
A lire aussi: Le travail des enfants sur les sites d’orpaillage
C’est comme si toute la population de Poura est dans l’orpaillage. Un tour en ville et l’on peut constater que dans chaque domicile, chaque coin de rue, il y a une machine, un objet qui envoient à l’orpaillage. Les gens rencontrés, les jeunes couverts de poussière des trous d’or… Le président de la Délégation spéciale de Poura, Moumouni Sawadogo confirme : « (…) plus de 90% de la population ne vit que de l’orpaillage. C’est leur activité principale ».
Et visiblement, l’autorité ne semble pas inquiétée pour les éventuels effets de cette pratique. Le président de la Délégation spéciale relève de la nuisance sonore et de la poussière du fait du traitement des extraits en ville, mais assure qu’il y a un contrôle des services de l’Environnement et des forces de l’Ordre pour ce qui est de l’utilisation de produits qui pourraient être dangereux.
Aucun produit dangereux n’est utilisé
« (…) pour l’instant, nous ne connaissons pas d’autres produits utilisés en dehors de ce qu’on voit, en tout cas au niveau des concessions. Si c’est en dehors des concessions, peut-être qu’ils utilisent d’autres produits que nous ignorons, ou bien ils se camouflent pour les utiliser. Ça aussi, lorsqu’on apprend, on mène des sensibilisations. Il y a souvent des saisis si c’est le cas », a fait savoir Moumouni.
L’œil d’un technicien de l’Environnement qui observe la situation n’est pas autant rassuré que le président de la Délégation spéciale de Poura. Pour lui, avec le ruissellement des eaux de pluies, s’il y a un cours d’eau à côté, les produits utilisés peuvent polluer. Il détaille que même si cela ne s’est jamais produit à Poura, ailleurs des cas existent. Il a pris l’exemple tout proche, de la mortalité de poissons dans le fleuve Mouhoun entre temps qui « est due à ces phénomènes-là ». On leur demande de faire des diguettes pour empêcher les eaux de pluies de drainer les résidus de leurs activités vers les cours d’eau.
A Lire aussi: Ruée vers l’or : « l’intellectuel des galeries » en quête du bon filon
Les premiers concernés, les orpailleurs pour certains d’entre eux rencontrés individuellement, rassurent n’utiliser aucun produit qui pourrait nuire. Ils corroborent les propos du président de la Délégation spéciale qui avait assuré qu’un contrôle est effectué et qu’officiellement rien de dangereux n’est utilisé.
Mais des propos de Moumouni Sawadogo, il ressort que l’orpaillage échappe à un véritable contrôle. Cela du fait que c’est de façon vraiment informelle que les orpailleurs s’installent.
Les bénéfices tirés de l’orpaillage
Parmi les avantages de l’orpaillage, le président de la Délégation spéciale de Poura a fait noter le paiement des factures de l’électricité. Les machines qui servent à écraser la terre extraite des trous supposée contenir de l’or fonctionne avec l’électricité. Aussi, les taxes au niveau de l’utilisation de l’eau font faire des chiffres, sans oublier les services des Impôts qui font des recettes, car les propriétaires de machine paient des impôts : « Tous ceux qui ont des machines payent les taxes », a confié M. Sawadogo.
La commune de Poura est située dans la Boucle du Mouhoun, au sud-ouest de la capitale Ouagadougou, à 160 kilomètres sur l’axe Ouaga-Bobo-Dioulasso. Les premiers exploitants du site sont des orpailleurs. Son exploitation a commencé dans les années 1940 en mode moderne ciel ouvert. Dans les années 1960, commence l’exploitation souterraine qui ne durera pas, pour des raisons économiques. Elle sera reprise par la SOREMIB en 1973.
Boureima Dembélé