A Ouagadougou, le marché des sextoys est florissant. Célibataire ou en couple, plusieurs personnes ont recours à ces gadgets pour se faire plaisir. Un univers assez fermé où presque personne n’avoue ouvertement son commerce ou son penchant vers ces objets de masturbation.
Dans un jardin de la capitale, Alimata Zèba arrive les bras chargés. Dans un gros sachet, elle y a mis sa marchandise : des sextoys. Elle renverse le contenu sur une grande table. De toutes les couleurs, de toutes les tailles, de toutes les formes. Pour homme comme pour femme. Sans sourciller, la jeune fille nous explique au moindre détail le mode d’utilisation de chaque sextoy. Le tout sous le regard curieux et inquisiteur des passants.
Depuis bientôt une année, Alimata Zèba a fait de la vente des sextoys son business. Et à l’en croire, le commerce est bien florissant. « Ça marche très bien, je m’en sors très bien aussi. Ça sort vraiment comme des petits pains, pas seulement à Ouaga, j’expédie dans d’autres villes », note Alimata qui vend en ligne.
Les sextoys sont des jouets sexuels principalement utilisés pour faciliter et augmenter le plaisir sexuel humain. Selon Alimata, ses clients manifestent toute leur satisfaction. « Personnellement, je suis assez contente car certains clients reviennent me dire qu’avec madame ça n’allait pas mais avec le sextoy, ils ont passé un bon moment, ça les a vraiment aidés », poursuit la jeune fille qui fait dans la vente en ligne.
Un complément de plaisir
L’utilisation des sextoys n’est pas liée à une absence de rapports sexuels, mais « c’est une question de recherche d’orgasme », confie Stéphane, nom d’emprunt. Ce jeune homme, la vingtaine révolue, est un utilisateur des sextoys depuis quatre (04) ans maintenant.
Objet de curiosité au départ, le sextoy a fini par entrer dans les habitudes sexuelles de Stéphane quand ses amis lui en ont vanté les effets.
« C’est le plaisir qui est intense avec les objets sexuels, c’est plus sensationnel qu’un rapport sexuel normal, et puis avec ces objets, on peut régler le degré de plaisir qu’on souhaite atteindre. C’est une question d’orgasme », tranche le jeune utilisateur.
Il en parle avec émotion parce que selon lui, le plaisir procuré par le sextoy est différent de celui qu’il reçoit lors d’un rapport sexuel avec une femme.
« J’ai des rapports sexuels avec des filles, mais ce n’est pas pareil en termes de plaisir. Je peux atteindre l’orgasme autant de fois que je souhaite, ce qui n’est pas évident avec une femme », nous explique Stéphane avec enthousiasme.
« Un sextoy ne peut remplacer un homme ou une femme »
Les arguments et l’expérience personnelle de Stéphane sur les sextoys ne convainquent pas tout le monde. Pour certains, c’est une pratique malsaine à interdire. C’est le cas de Adama Bania qui déplore avec véhémence qu’un homme ou une femme puisse prendre du plaisir avec un objet.
« Je trouve cela aberrant, pas normal. Si Dieu a créé l’homme et la femme avec des organes génitaux différents, c’est pour se compléter. Maintenant, utiliser un objet pour son plaisir personnel, moi je trouve que ce n’est pas joli à voir », regrette Adama. Pis, il ajoute que selon lui, ce n’est ni plus, ni moins qu’une « dépravation des mœurs ».
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« Un sextoy ne peut remplacer un homme ou une femme, ce n’est pas possible », tranche-t-il d’un air fâché. Son avis est partagé par Claudia, une commerçante. Elle en veut particulièrement aux femmes qui utilisent ces objets sexuels. « Normalement, c’est deux personnes qui font un rapport sexuel. Comment laisser la chaleur d’un homme pour préférer un objet ? Un objet ça ne caresse pas, ça n’embrasse pas, ça ne peut pas remplacer un homme», argumente la commerçante qui traduit ainsi sa déception.
Que dit la médicine ?
Gynécologue obstétricien, Dr Gilbert Kafando est formel sur l’utilisation des sextoys. Autant ces objets sexuels procurent du plaisir, autant ils peuvent avoir des inconvénients sur la santé humaine. « Médicalement, il y a un problème d’hygiène qui se pose. Le vagin est un organe assez complexe. C’est une cavité virtuelle qui s’élargit et en introduisant des objets, on apporte des germes », prévient le gynécologue.
D’une voix calme, mais convaincante, le jeune Dr ajoute que l’introduction de ces objets peut perturber la flore naturelle qui dispose d’un ensemble de bactéries chargées de réguler le bon fonctionnement. Par contre, précise-t-il, l’utilisation d’un objet sexuel peut causer des démangeaisons, des pertes blanches à répétition.
Le risque peut être grand, met en garde le gynécologue : « Tout cela peut conduire à la stérilité, car plus on a des infections non traitées, plus on risque de boucher les trompes ». Au Burkina-Faso, des utilisateurs des sextoys jouent encore la carte du silence de peur d’être jugés. Par contre, de plus en plus, les ventes ne sont plus seulement en ligne. Des commerces physiques spécialisés de ces objets poussent progressivement en ville.
Salamatou Dicko (Stagiaire)