Dès l’aube, elles sont déjà en route. Ce sont elles qui ouvrent pratiquement les marchés et yaars de la ville de Ouagadougou. Vendeuse de légumes pour l’essentiel, des femmes se sont spécialisées au commerce de bonne heure. 2h ou 4 du matin les étals sont déjà déployés et reçoivent les premiers clients. Une activité qui n’est pas sans risques pour ces dynamiques commerçantes très matinales.
Il est 2h du matin et Awa Ouédraogo a déjà pris place au marché de Larlé. La mère de 3 enfants vend des condiments en ces lieux depuis plus de 20 ans. Résidente du quartier qui donne son nom au marché, la nature des condiments qu’elle vend varie en fonction des saisons et de ce dont disposent les grossistes.
Du piment, des feuilles comestibles, des tomates, des aubergines sauvages, des pommes de terre… « Tout change en fonction de ce que je gagne avec les grossistes. Si je prends des tomates, je vends et le lendemain, je fais tout mon possible pour avoir autres condiments que des tomates. Je ne vends pas les mêmes légumes successivement », explique-t-elle.
Lire aussi : Burkina, profession « écailleuses » de poissons
2 heures plus tard, c’est-à-dire à 4 heures du matin dans un autre marché, celui de la Cité An2 Aïssatou Ilboudo fait son entrée. La quarantaine, elle s’est spécialisée dans la vente de l’igname et de la patate. Depuis plus de 25 ans qu’elle exerce dans le domaine. Chaque fin du mois, Aïssatou va se ravitailler à Léo, Chaque fin du mois, Aïssatou se rend dans la province de la Sissili, dans la région du Centre-Ouest, réputée pour être une grande productrice de tubercules pour se ravitailler.
Des revendeuses et bon nombre de femmes qui travaillent dans la restauration sont des habituées du commerce matinal. Elles se retrouvent très tôt sur ces lieux pour faire leur achat afin d’assurer le petit déjeuner et le déjeuner pour leurs clients. Irène, restauratrice dans une structure en place, est une fidèle du marché de Larlé. A 6 heures du matin, elle est déjà là. « Chaque deux jours, je viens faire le marché ici très tôt. Les prix sont abordables et les vendeuses sont dynamiques et courtoises. Aussi, cela me permet d’être à l’heure pour mes prestations» dit-elle.
Un business risqué
Se réveiller à 1 heure du matin ou encore vers 3 heures du matin, quitter le domicile familial à vélo ou à moto pour se rendre au lieu de commerce est un gros risque que prennent ces femmes qui se battent pour gagner dignement leur pain quotidien.
Agnès Ilboudo, mère de 3 enfants, fait le commerce du piment depuis plus de deux décennies. Riveraine du même quartier, Agnès se rend au marché à 4 heures du matin. Selon elle, toutes les commerçantes qui viennent de bonne heure pour mener cette activité prennent de grands risques. « Nous sommes des Africains et ici au Burkina, on nous a toujours fait savoir que les marchés sont des lieux des génies, alors que nous, nous y sommes très tôt. Souvent il y a des choses étranges qui se passent lorsqu’on est sur les lieux et cela fait extrêmement peur», fait-elle savoir.
Lire aussi: Aliment pour bétail, à Ouaga, un marché nocturne animé par des femmes
Safiatou Tapsoba est vendeuse de poivrons au marché de Larlé depuis plus de 10 ans. Bien qu’elle habite dans un quartier où le taux d’agression est élevé, elle risque sa vie pour éviter la mendicité. Elle rappelle qu’avant, des commerçantes de bonne heure subissaient des viols ou des agressions physiques. Pour cela, elle a dû changer ses habitudes. « Je ne peux plus venir très tôt, il ya des voleurs partout. Ils agressent, volent nos recettes, et nos engins. Pire, ils poignardent souvent lorsqu’il y’ a une réticence. Les voleurs viennent souvent même dans le marché, pour voler les clients et nous les commerçantes » a confié Safiatou.
Toutes les vendeuses rencontrées font cas d’agression. Contrairement au marché de larlé, les commerçantes de la cité An2 n’ont plus le courage de s’y rendre très tôt le matin de peur de se faire agresser. Leurs heures d’arrivée varient maintenant entre 4 heures et 5 heures du matin.
Une activité sans repos
Awa Ouédraogo et ses camarades passent la majeure partie de leur journée au marché. Les soirs quand elles rentrent chez elles, elles n’ont que quelques heures de repos avant de se réveiller à l’aube, se préparer pour reprendre la route.
Ce manque de sommeil chronique les expose à des risques cardiaques, à l’hypertension artérielle et d’autres maladies. Pas seulement. « Nous n’avons pas le temps de nous reposer, souvent je somnole au marché. Le soir, arrivée à la maison, il faut effectuer les tâches de la maison. Pour la plupart des femmes de ce domaine, il est difficile de bien suivre l’éducation de nos enfants. Actuellement je souffre de l’hypertension et le médecin me demande de me reposer davantage », dit Raïssa Tiendrebeogo, vendeuse de tomates et d’aubergines au marché de Larlé.
MoussoNews avec Studio Yafa