La ville est encore endormie, mais Lydia Sanou est déjà sur pieds. A 3 h du matin, sa longue journée commence par la boulangerie du quartier où elle prend des miches de pain. Commence une longue marche dans les différentes ruelles de Kua, un quartier de Bobo Dioulasso. Chargée d’un plat qu’elle porte sur sa tête, elle passe de famille en famille pour revendre le pain. Pour la mère de deux enfants, c’est la longue marche pour l’autonomie.
Le pas agile, chargée d’un plat plein de miches de pain, Lydia Sanou a l’air pressée. Avant les premières lueurs du soleil, elle, sa journée semble avoir commencé depuis. « Je commence mon travail à 3 h du matin. Je mets mon réveille à 3h du matin pour aller à la boulangerie », nous lance-t-elle. Entre les salutations de quelques « lève tôt » comme elle, elle marque un arrêt. Se décharge de son plat, emballe une miche de pain qu’elle remet à une cliente.
Dans une cour, presque toutes les portes sont encore fermées. Lydia se dirige vers la seule entrouverte, et toque. Une dame âgée sort. Quelques salamalecs, et la commerçante matinale lui tend une miche de pain, encaisse les quelques pièces et repart. « Elle est comme une mère pour moi. Je lui livre le pain depuis longtemps », nous fait-elle savoir.
C’est même rituel pour la jeune dame depuis 3 ans.
La longue marche pour l’autonomie
A la boulangerie, Lydia prend quotidiennement 300 miches de pain pour un coût de 7000F CFA. Quand elle entre en possession de sa marchandise, commence une longue marche. Elle sait où se trouve sa clientèle et il faut s’y rendre vite pour qu’elle prenne son petit déjeuner. « Si on m’appelle, je vais servir. Quand je passe, je ne dis rien. Je connais ceux à qui je dois livrer chaque matin », ajoute notre guide qui ce matin du 30 juin, après chaque livraison se dirige immédiatement vers une autre cour.
« Nous sommes fiers d’elle », dit avec fierté Djénéba Sanon, belle-mère de Lydia. C’est dans le quartier que les deux femmes se croisent, alors que la vieille femme s’apprête à aller vendre du charbon. Comme pour soutenir sa belle-fille, Mamy Djénéba prend une miche de pain pour ses petits-enfants.
La fatigue est bien là. Mais il faut continuer à marcher. Il faut bien nourrir les deux enfants et subvenir aux autres besoins de la famille. Quel est le gain quotidien de notre livreuse de pain matinal ? Aucune idée, répond-t-elle. Les ristournes qu’elle perçoit à la boulangerie dépendent du nombre de miches de pain vendu par jour. « C’est à la fin du mois que je peux savoir combien de bénéfice j’ai fait. Si ce n’est pas la fin du mois, je ne gagne rien », dit-elle.
Quand le soleil se lève et que l’heure du petit déjeuner est passée, il arrive que Lydia n’ait pas réussi à liquider la totalité de son pain. La journée n’est donc pas terminée pour elle. Elle replie à la maison, frit du poisson qu’elle revend, accompagné du poisson comme sandwich.
Sa journée se termine aux environs de 22h pour reprendre le lendemain, alors que la ville est encore endormie.
Tiga Cheick Sawadogo