Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les autorités burkinabè ont annoncé l’interdiction à la circulation des motos de type Sanili, Aloba, Fortune et les tricycles de transport de passagers. A Kongoussi, dans la région du Centre-Nord, la population est partagée par cette décision.
Madi Sayoré est déplacé résidant à Kongoussi. Pour ses différents déplacements dans la ville de Kongoussi et les villages environnants, il utilise une moto Sanili. La mauvaise qualité des routes dans la localité exige des motos de grosses cylindrées. Mais depuis le 29 juin, le gouvernement interdit la circulation des tricycles et des grosses cylindrées.
Pour Madi Sayoré, cette décision tombe au mauvais moment. « Cette mesure va davantage compliquer la vie à de nombreuses personnes. Les engins visés sont ceux qui sont les plus utilisés dans les villages », explique-t-il avec déception. Selon lui, ces moyens sont très importants dans leur communauté.
« Souvent, pour transporter un malade, à défaut de l’ambulance, ce sont ces motos qui sont utilisées. Si les autorités pouvaient chercher d’autres solutions, ce serait encore mieux. C’est illusoire de penser que le problème perdure à cause de la circulation de ces types de motos. Non ! Même à pieds, les indésirables peuvent opérer », estime-t-il.
Les tricycles, poursuit Madi, sont pratiquement le seul moyen pour les populations de fuir en cas d’attaques terroristes. « Avec les risques, les camions n’osent pas s’aventurer dans certaines zones et les tricycles apparaissent comme moyens alternatifs de transport en commun », ajoute-t-il.
Le chômage en vue
Pierre Sawadogo conducteur de tricycle est lui également inquiet. Pour lui cette interdiction va causer d’énormes désagréments dans la province du Bam. Il risque de se retrouver au chômage. « En plus du transport des biens, nous sommes également sollicités pour le transport de personnes à l’occasion des mariages, des baptêmes, des funérailles, etc.», a-t-il dit.
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C’est cette activité qui permet à Pierre de nourrir sa famille. Pierre Sawadogo propose une autre alternative : Interdire l’accès aux zones dites rouges à ces moyens de transport. « Si l’autorité pouvait identifier des zones interdites d’accès ce serait mieux que d’interdire les tricycles dans toute la commune ou dans toute la province. Ce serait dommageable pour nous », déplore le jeune homme.
Si la sécurité passe par là…
Boureima Konfé, fièrement assis sur sa moto Sanili est d’accord que cette décision va contribuer à compliquer la vie déjà difficile. Mais il estime que si la solution viendra de là, il faudra que les populations consentent des sacrifices. « Si l’interdiction de ces motos va réellement permettre de faire revenir définitivement la paix dans le pays, nous sommes prêts à appliquer la mesure. Mais il ne faudrait pas que cela soit une mesure de trop, sans plus-value dans la lutte contre le terrorisme, qui n’aura eu d’effets que d’alourdir la peine à la population ».
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Un autre conducteur vient de garer son tricycle devant une boutique garée au grand marché de Kongoussi. Jean Baptiste Sawadogo a également fait de cette activité sa principale source de revenus. L’homme dit comprendre cette décision gouvernementale : « Comme c’est l’intérêt supérieur de la nation qui est recherché, nous ne pouvons que nous y soumettre », reconnait le conducteur.
Les motos Aloba et les autres du même type ainsi que les tricycles de transport de passagers seront interdits à la circulation bientôt dans huit régions dont le Centre Nord. Ainsi en ont décidé les autorités burkinabè à travers l’ordonnance n°2022-006 /PRES-TRANS du 29 juin 2022. Cette mesure, vise selon le gouvernement à réduire la capacité de nuisance des groupes armés. Les régions concernées sont la Boucle du Mouhoun, les Cascades, le Centre-est, le Centre-nord, l’Est, les Hauts Bassins, le Nord et le Sahel.
Zondwend Konseimbo (collaborateur)