Au Burkina Faso, il est possible de vieillir en bonne santé. Au-delà des soins classiques dispensés dans les centres de santé, une spécialisation méconnue se consacre spécifiquement aux personnes âgées : le gériatre gérontologue. Zoom sur cette compétence peu connue.
Méconnaissance. C’est le constat, lorsqu’on promène son micro dans les rues de Ouagadougou sur le métier de gériatre gérontologue. Rencontré au quartier Goughin de Ouagadougou, Moussa Tapsoba, 60 ans, nous fait comprendre qu’il ne sait pas ce qu’est un gériatre. Il ignore également l’existence de professionnels de santé dédiés exclusivement aux personnes âgées.
Comme lui, ni Salimata Koté occupée devant sa casserole au feu remplie de patates, banane plantain et gâteaux, attendant des clients ni Zourata Simporé, revenant d’un centre de santé avec son enfant malade au dos, ne connaissent l’existence des médecins spécialisés pour personnes âgées.
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Le Dr Louis Sylvain Ouédraogo, médecin gériatre gérontologue, explique que le gériatre est un médecin qui a déjà suivi une formation de médecine générale et qui s’est spécialisé dans un domaine précis appelé la gériatrie. Cette spécialité qui s’occupe des problèmes de santé de la personne âgée. Il précise que les patients pris en charge par les gériatres ont au moins 60 ans.
Aussi, Dr Ouédraogo explique qu’à l’image du pédiatre qui s’occupe des problèmes de santé de l’enfant ; qu’il s’agisse de la toux, de problèmes urinaires ou cardiaques, le gériatre s’occupe de tous les problèmes de santé quel que soit l’organe qui est touché. Que ce soit des problèmes cardiaques, pulmonaires, cérébraux, psychologiques ou sociaux, le gériatre est là pour prendre en charge les personnes âgées.
La différence entre gériatre et gérontologue
Dr Ouédraogo qui dit s’être battu pour être accepté dans le système sanitaire burkinabè, établit une différence entre la gériatrie et la gérontologue. La gérontologie est une science qui englobe toutes les disciplines qui s’occupent de la personne âgée. « Quand vous voulez travailler sur le vieillissement, c’est la gérontologie. Mais à l’intérieur il y a des économistes chargés de voir, par exemple, comment les personnes âgées vont tenir le mois. Il y a des sociologues qui sont chargés de s’occuper des problèmes sociaux que les personnes âgées ont dans les communautés et quartiers » , explique-t-il.
De même, dans les domaines de la justice, de l’architecture, il y a de la gérontologie . « Lorsque vous concevez des bâtiments et vous tenez compte des personnes âgées, il y a des choses que vous allez rajouter, qu’un bâtiment pour jeunes ne va pas prendre en compte. Etant architecte si vous faites ça, vous êtes gérontologue. A chaque fois que vous allez vous occuper d’un problème en lien avec les personnes âgées vous faites de la gérontologie », poursuit Dr Ouédraogo.
Dr. Sylvain Ouédraogo est le seul gériatre gérontologie du Burkina Faso. Il regrette que son domaine ne soit pas assez connu et surtout que les gens ne viennent vers lui que quand c’est tard. « Ce n’est pas tout le temps facile de pouvoir les récupérer, d’autant plus que qu’ils sont fragiles », déplore le spécialiste.
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L’autre difficulté que rencontre Dr. Sylvain Ouédraogo, c’est l’âgisme qu’il définit comme un comportement discriminatoire lié à l’âge. Dans sa pratique quotidienne, il constate que des familles hésitent à faire soigner une personne âgée parce qu’elle serait assez vieille pour mourir. « On en a beaucoup dans le service. Le malade est là, c’est vrai que ses soins demandent de lourds moyens, mais la famille décide elle-même de laisser comme ça, vu l’âge du malade. Et à ce moment-là vous donnez les examens, les ordonnances, ils ne font rien, et on comprend qu’ils ont décidé d’arrêter. Alors que vous savez en âme et conscience que vous pouvez le sauver » , déplore-t-il en précisant que ces situations, fréquentes sont émotionnellement éprouvantes.
Un Centre de gériatrie verra bientôt le jour à Ouagadougou. La pose de la première pierre a eu le 14 décembre 2018 à Toukin dans l’arrondissement 4 de Ouagadougou. Il est prévu pour contribuer au renforcement de l’offre et de la qualité des soins, à une meilleure prise en charge des personnes âgées et des retraités. D’une capacité de 20 lits d’hospitalisation avec possibilité d’extension, le centre est financé par la Caisse autonome de retraite des fonctionnaires (CARFO) à plus de 900 millions de francs CFA.
Boureima Dembélé