Au cœur de Bobo-Dioulasso, la deuxième ville du Burkina Faso, l’espace Jeunesse Dafra s’anime d’une effervescence particulière. C’est ici que près de 2000 enfants se sont réunis pour plonger dans l’univers riche d’apprentissage de la culture burkinabè, à l’occasion de la Semaine Nationale de la Culture (SNC) 2024.
Dès l’entrée de l’Espace Jeunesse Dafra de Bobo Dioulasso, les rires et les cris de joie des enfants résonnent. Ils témoignent de l’énergie débordante qui anime ce lieu dédié à l’apprentissage et à la découverte de la SNC. Sur le plateau des sports de main, des jeunes filles et garçons, vêtus de blanc, se laissent guider par les encadreurs dans une danse rythmée. Leurs mouvements se mêlent en une chorégraphie harmonieuse.
Bertrand Sanou est l’un des moniteurs de danse. Depuis trois jours, il apprend une chorégraphie aux enfants pour animer un spectacle à la fin du festival. « Nous apprenons la danse qu’on appelle le djansa, une danse africaine. Les pas de danse ne sont pas très faciles mais avec les enfants, ça promet », assure-t-il, tout sourire. Cet atelier fait le bonheur de Clémentine Traoré, 11 ans. « C’est mon rêve de devenir danseuse », dit la jeune fille toute enthousiaste. Débordante d’énergie, Clémentine s’applique à bien rendre la leçon du jour. Car, pour leur permettre de mieux assimiler, l’encadreur fait jouer la concurrence entre les différents groupes qu’il a constitué.
La patience des moniteurs
Non loin, l’atelier de Djembé attire l’attention avec ses rythmes entraînants. Une dizaine d’enfants, djembés en mains, assis sur des chaises métalliques, s’initient à cet instrument emblématique, sous l’œil attentif de moniteurs parmi lesquels, Mamadou Sanou. Il veille à ce que chaque coup de main soit en parfaite synchronie avec le groupe. Le moniteur multiplie les explications. « C’est aujourd’hui qu’ils ont commencé », explique-t-il pour montrer que ces enfants ont tout à apprendre.
« Souvent, je me lève pour les diriger parce que souvent les mains ne sont pas bien classées. Je leur explique comment placer la main pour bien battre pour que ce soit tonique ou classique. En tapant, il y a un sens. Quand un autre joue, l’autre doit savoir qu’il a donné tel message et il joue en fonction de cela », précise le moniteur.
Avec ces débutants, Mamadou Sanon veille à ce que chaque enfant puisse s’en sortir le plus rapidement possible. Les enfants sont nombreux et le temps manque. Et lorsque certains n’y arrivent pas, il trouve une solution. « Quand un enfant n’arrive pas à bien jouer, on change de notes ou bien on lui donne un autre instrument », précise Mamadou.
Application à l’atelier de dessin
A l’opposé, l’atelier de dessin offre un contraste apaisant. Divisés en trois groupes, les enfants y explorent leur créativité, certains s’essayant au batik, d’autres se concentrant sur le dessin ou la peinture, chacun donnant vie à ses propres visions artistiques. Parmi les apprenants, Abdoul Jabbar Kiéma, se montre appliqué dans son apprentissage.
A 11 ans, l’adolescent s’est passionné au dessin. Il affirme passer du temps à dessiner lorsqu’il se trouve à la maison. « A la SNC, c’est une opportunité pour moi d’améliorer mes dessins et connaitre ma culture. L’an passé, c’était joli. Cette année, ils ont mis plus d’initiatives. Ils ont introduit la peinture, c’est très bien », se réjouit le garçon. Abdoul Jabbar participe pour la deuxième fois aux ateliers dédiés aux enfants à la SNC. Il y a pris goût depuis l’année précédente et veut continuer à s’améliorer.
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Quant à l’atelier des jeunes de marionnettes, il captive également un autre groupe d’enfants. Ici, guidés par la voix expérimentée du conteur Amadou Traoré, surnommé « la voix du passé », les enfants s’affairent à créer des visages à partir de chiffons. Des objets de récupération sont transformés en jouets animés. Avec leurs chef d’œuvres, ils prendront part au spectacle de clôture. Un pot de peinture en main, Arlette Sanou, 11 ans, peint une marionnette. En quelques jours, la fillette a déjà assimilé un paquet de connaissance.
Pour sa première participation, Clémentine savoure ce moment. « Je suis venu à la SNC 2024, j’aime faire les marionnettes, j’aime beaucoup. On utilise les mèches, on découpe les chiffons pour faire le corps de la poupée et à fabriquer sa tête », dit-elle toute joyeuse. Dans ce tableau vivant, Amadou Traoré explique : « D’abord, les enfants aiment les poupées. Donc, chacun se rend au four et au moulin pour avoir la plus belle des poupées ».
Les trésors humains vivants s’impliquent
L’atelier de poterie est un retour aux sources pour les jeunes apprentis. Sous la guidance de Danielle Kanzié, animatrice socio-éducative, les enfants apprennent à donner forme à l’argile. Selon Danielle, plus que de simples objets, ces pots sont des symboles de la vie quotidienne burkinabè.
« Les enfants apprécient cet atelier. Ils essaient eux-mêmes de modeler l’argile pour faire des pots. Ce que vous voyez, c’est la réalisation des enfants. Les formatrices commencent et les enfants font la finition », révèle-t-elle en indiquant des pots fraichement fabriqués posés à même le sol.
Et puis, dans un petit groupe presqu’à l’écart, Martine Ouédraogo, reconnue comme trésor humain vivant, offre aux enfants une fenêtre sur le passé à travers l’art culinaire. Elle enseigne bien plus que des recettes.
Martine leur transmet des coutumes, des interdits. Par exemple, les enfants apprennent que cuisiner n’est pas seulement un acte de préparation de nourriture, mais un rituel. Mais, les difficultés sont nombreuses entre la gestion d’un grand nombre d’enfants et l’insuffisance du matériel. Cela n’empêche aucun des encadreurs à s’adonner avec ardeur pour transmettre ces valeurs culturelles à ces enfants.
Moussa Kafando, président de la commission enfant de la SNC 2024 attend environs 1500 enfants chaque jour durant la période du festival. Toutefois, il se dit débordé car les enfants manifestent beaucoup d’intérêts à ces ateliers.
Boukari Ouédraogo