Entre sensibilisations sur les bons comportements et interventions pour la sécurisation des biens et des personnes, la nouvelle Police secours se positionne comme l’ange gardien des moments paisibles. Journée de patrouille avec cette unité de la police qui se veut plus prooche des populations.
7h10 ! Heure de départ du Commissariat central de Police de Ouagadougou pour l’équipe du jour de la nouvelle Police secours chargée de la sensibilisation. Le groupe est composé de trois agents, une femme et deux hommes. Direction Ouaga 2000. Le véhicule brandé aux couleurs de l’institution roule à 30km/h. La radio de bord diffuse les informations du matin, dans une bonne ambiance de causerie entre le chef d’équipe, l’Adjudant de Police Boureima Sankara, et ses collègues.
Pour cette destination, l’équipe prend le plus long chemin possible, afin d’observer la ville, comme un tour de propriété. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’un cas se présente au niveau d’un rond-point de Karpala, quartier de la capitale. Un accident met aux prises une citerne de vidange de fosses septiques et une dame à vélo, portant son bébé au dos. Si la vie des deux est sauve, la maman a la cheville touchée. Mais sa grosse peur, c’est son enfant ! Assise à même le sol, à côté de son vélo broyé par la citerne, elle développe une sorte de crise de panique, pleurant et tremblant des mains.
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La seule femme de l’équipe, Sergent Zénabo Ouédraogo, s’approche, s’accroupit auprès d’elle, lui parle, la rassure. Elle se calme. Son enfant n’a rien. Zénabo raconte: « Vu que c’est une dame et que je suis une dame dans l’équipe, je me suis approchée pour la consoler. Quand on arrive dans des lieux d’accidents, on laisse tomber le côté policier et ça devient comme une famille. On se familiarise avec la personne afin qu’elle soit confiante et se laisser aller et nous écouter ».
Au même moment, le reste de l’équipe s’occupe. Pendant que le chef de l’équipe, l’Adjudant de Police Boureima Sankara, appelle les Sapeurs-pompiers, l’autre régule la circulation qui s’est embouteillée, entre-temps à cause des curieux. Au bout d’une heure, la situation est gérée : « On a vu ça venir de loin, donc on était obligés de nous arrêter, pour baliser la voie et contacter les services d’urgence. On a aussi appelé la section des accidents qui doit venir faire les constats. Il y avait un grand embouteillage, on a essayé de réglementer la circulation », récapitule Boureima.
Un anniversaire annulé?
Après cet incident, l’équipe poursuit sa ronde de la ville. Elle tombe un peu plus loin sur un deuxième accident impliquant deux voitures. Pas de blessés. Les deux conducteurs avaient déjà appelé la section chargée des constats à la Police nationale. Boureima et ses coéquipiers saisissent tout de même l’occasion pour une sensibilisation, après avoir constaté l’absence de triangle au sol dans les deux véhicules.
11h ! Nouvelle étape. Dans le quartier huppé de Ouaga 2000, des jeunes viennent pratiquer le « wheeling« , une activité consistant à soulever la roue avant d’un engin et à rouler uniquement sur la roue arrière. Non loin d’une station-service d’essence, de petits hangars en pailles offrent leur ombrage à des jeunes assis sur des chaises. A l’approche, l’on peut constater que ce sont des élèves, certains en tenue scolaire. S’il y en a assis, d’autres sont encore sur leurs mobylettes.
Ils expliquent être là pour un anniversaire. Des mots de sensibilisation et les agents se dirigent dans la boutique de la station. Là encore des sensibilisations, notamment sur ce qui est vendu aux élèves. Il s’est agi surtout de signifier qu’il est interdit de vendre de l’alcool aux élèves. Après la boutique, les élèves ont disparu comme par enchantement. Il n’y plus de fête d’anniversaire visiblement. L’Adjudant de Police explique qu’en réalité, ils étaient là, à une heure de cours, pour du wheeling. Et comme ils ont été démasqués, ils ont fui sans demander leur reste.
La prochaine étape du périple journalier, c’est le quartier Patte d’Oie et a consisté en des échanges avec des clients d’un kiosque à café. « C’est bien que la Police approche les populations de cette manière, parce que les deux doivent travailler en symbiose. Avec la situation, on trouve que la Police doit venir nous voir plus. Nous les Burkinabè, nous avons peur de la Police, nous avons peur du Commissariat », commente Ousséni Ilboudo, commerçant. Bras sur une épaule par ci, rire par-là, signes d’échanges cordiaux avec ces populations. Et c’est ainsi 24h durant, à chaque sortie de cette entité de la Police nationale.
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Même section, mais autre équipe, autre véhicule, tenue cette fois bariolée, et même objectif : être proche des populations, leur porter secours, mais en mode plus énergique ! L’autre versant de la Nouvelle police secours. Elle, assure les interventions. Munis d’armes, portant des gilets pare-balles, le Sergent-chef Abel Somé et son équipe à bord d’un pick-up embarquent pour 24h ! Ils doivent sillonner la ville pour dissuader, mais aussi intervenir s’il le faut.
C’est aussi, cette équipe qui est contactée en cas d’appel aux numéros d’urgence de la Police nationale que sont le 17 et le 10 10. Pour la journée d’intervention, l’équipe quitte le commissariat central en direction de la Zone du Bois, quartier non loin de l’Université Joseph Ki-Zerbo. Mais à peine dans ce quartier, ils sont sollicités à l’autre bout de la ville, Pissy, un quartier à la sortie ouest de la capitale. Un cas d’escroquerie dans un lycée.
Le censeur de l’établissement raconte que des élèves sont venus se plaindre parce qu’ils ont été agressés et leur argent retiré. « Je leur ai dit d’aller et de prévenir si l’agresseur revient. Entre-temps ils sont revenus me dire qu’il est en 6e II. Quand je l’ai vu avec des boucles d’oreilles, j’ai su que ce n’était pas une bonne personne. Pendant que je lui posais des questions, il a pris la fuite. Nous l’avons poursuivi et rattrapé et remis à la Police », explique le censeur. Après avoir recueilli toutes les informations possibles, le présumé truand est conduit au Commissariat le plus proche.
A peine cette mission terminée, le téléphone du chef d’équipe, le Sergent Abel Somé, sonne. Un individu menace de mort un directeur dans une Administration au quartier Kilwin. De Pissy, le cap est mis sur ce quartier en périphérie nord de Ouagadougou. Il y a urgence. Une vie est peut-être en danger.
Sirène, gyrophare mais difficile de se frayer un chemin dans la circulation de la capitale. Arrivés sur place, trop tard, l’individu est déjà parti. Mais pas de dégât ! Après de longues minutes d’échanges avec le premier responsable des lieux, Abel explique avoir recueilli des informations à transmettre à la Brigade de recherches pour la suite. N’ayant plus grand-chose à faire là, l’équipe lève l’ancre. La suite est une tournée de dissuasion, jusqu’en fin de matinée.
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Le Chef des opérations de la Nouvelle Police secours, le Capitaine de Police Rémi Ki, explique qu’ « avant chaque sortie, il y a un briefing et un debriefing après chaque sortie. Ils reviennent avec des informations sécuritaires recueillies auprès des populations. Ils nous rendent compte. Sur la base de ces informations, par exemple, les zones criminogènes de la ville sont déterminées et certaines informations sont utiles dans le contexte de lutte contre le terrorisme ».
Le chef de la section intervention et prévention de la même unité, le Lieutenant de Police, Mahama Diallo, signale des difficultés qui se résument en «un problème d’effectif ». Il relève aussi l’incivisme qui est un problème auquel, ils sont confrontés. « Les gens ne laissent pas la route aux équipes. Alors que ce sont les mêmes qui n’arrivent pas à comprendre pourquoi on met du temps avant d’arriver sur les lieux », a-t-il déploré.
La Nouvelle Police secours a vocation de Police de proximité. Elle a été relancée le 22 octobre 2020, avec pour objectif principal de rapprocher les populations des forces de sécurité intérieure.
Boureima Dembélé