Burkina : vente du wifi, petite révolution d’accès internet à Koudougou

Burkina : vente du wifi, petite révolution d’accès internet à Koudougou

Après l’époque des cybercafés, il faut désormais compter avec la vente du wifi. A Koudougou, dans la région du Centre-Ouest, l’arrivée de la fibre optique a été accompagnée d’une petite révolution dans la fourniture d’Internet. Des jeunes ont développé un système pour fournir la connexion internet dans leurs quartiers à des coûts allant de 100 F l’heure à 2000 F CFA le mois. Une manière de tourner dos aux opérateurs de téléphonie mobile dont les forfaits sont jugés chers et non fiables.

Un jour ordinaire au secteur 8 de Koudougou, province du Boulkiemdé. Assis sur un banc à l’entrée de sa boutique de pressing au bord du goudron, Judicaël Zongo a le nez plongé dans son téléphone. Les klaxons des véhicules et des engins à deux roues ne semblent pas détourner le jeune homme de son smartphone. Tantôt sur Facebook, souvent sur WhatsApp. Les réseaux sociaux sont pour lui, un refuge quand il n’a pas de clients.

Judicaël Zongo (au premier plan) devant son pressing, Koudougou le 1er août, Studio Yafa

Il y a trois ans, il se connectait à Internet avec les forfaits des opérateurs de téléphonie auxquels il souscrivait. Une saignée financière à l’époque, admet-il. « Avant, je mettais les mégas avec un opérateur de téléphonie à 1050 F CFA pour une semaine avec 2 gigas. Dès que tu mets, sans te rendre compte, c’est déjà fini. Souvent, tu ne sais même pas ce que tu as fait. C’était énervant », maugrée le jeune homme.

Depuis, Judicaël se connecte via le Wifi de Digital Solution, une boutique de vente de solutions informatiques à proximité de son pressing.  « C’est vraiment plus avantageux. Lui, il fait 2 gigas à 2000 F CFA et c’est pour le mois. Vous-même, vous voyez que la différence est grande », poursuit le tenancier du pressing.

Une petite révolution pour rester connecter

Le wifi auquel se connecte Judicaël est celui de Bakari Kabré, technicien en maintenance informatique. Ancien propriétaire d’un cybercafé, il se considère comme l’un des pionniers de la vente du wifi à Koudougou, grâce à l’arrivée de la fibre optique dans la ville. Selon lui, la technologie du wifi est bien plus simple que celle des cybercafés. Pas d’ordinateur à connecter en permanence à l’électricité, pas de maintenance, plus besoin d’un grand espace pour déposer le matériel, et surtout plus besoin d’être présent physiquement.

Bakari Kabré, fournisseur de wifi, Koudougou le 30 juillet, Studio Yafa

Son basculement vers ce système est aussi lié à sa propre expérience. «Il y a  des gens qui amènent des appareils pour que je fasse les mises à jour. Je pouvais dépenser 3 000 à 4 000 F CFA pour la connexion par jour. Quand je calculais le mois, je me rendais compte que je dépensais énormément d’argent », se souvient-il.

Du coup,  il achète mensuellement la connexion chez un fournisseur. A l’aide d’autres équipements, il paramètre et rend son signal disponible dans un certain rayon.  « J’utilise Mikro Tik. Il y a des appareils sur le marché qui génèrent les tickets qui sont utilisables une seule fois. On conçoit la plateforme avec une page d’accueil avec les différents prix et les durées qui vont d’une heure à un mois », explique-t-il.

Lire aussi : Wifi gratuit à l’Université: quand le signal ne passe plus pour les étudiants en première année

Roland Sawadogo est étudiant en première année de maintenance industrielle. Ancien client des forfaits internet des téléphones mobiles, il a basculé dans l’achat du wifi depuis plus d’un année. Gérant d’une boutique de transfert d’argent à ses heures perdues, c’est avec son pass de 750 F CFA par semaine qu’il dit télécharger ses travaux dirigés envoyés dans un groupe WhatsApp et des sujets pour s’exercer. Bien que l’université Norbert Zongo où il est inscrit dispose d’un wifi gratuit pour les étudiants, il préfère celui acheté. « A l’université, nous sommes des milliers à nous connecter donc on ne peut rien faire pratiquement », regrette l’étudiant.

Bakari Kabré explique comment le système fonctionne, Koudougou le 30 juillet, Studio Yafa

Assis sur une chaise, stylo en main et des feuilles blanches à ses côtés, Samuel Gnebga jette souvent un coup d’œil dans son téléphone et griffonne sur une feuille.  Enseignant de mathématiques,  lui également est un client du wifi, à trois endroits de la ville. « Avec les multitudes recherches qu’on fait, si je prends 2 gigas pour une semaine, j’épuise tout en une journée. Alors qu’avec le wifi, je fais des recherches, je télécharge même des fichiers PDF, des vidéos », détaille-t-il.

Lire aussi : le mode avion pour dénoncer le coût des prestations des téléphonies mobiles

Le wifi acheté, plus économique, clament des utilisateurs. Mais certains regrettent le faible rayon de couverture du signal. « Actuellement même à 20 m, ça devient compliqué et surtout il faut avoir un bon téléphone ». Complainte de l’étudiant Roland Sawadogo, alors que Samuel Gnebga ajoute que : « pour une semaine de connexion, souvent il n’y a pas de connexion pendant trois jours. Quand il y a des coupures de courant, le wifi ne marche plus ».

Des distributeurs de wifi comme Bakari Kabré admettent que certains paramètres techniques ne sont pas maitrisés par les utilisateurs. La qualité de la connexion et la portée du signal dépendent du matériel utilisé. « Il y a des antennes qui couvrent un rayon de 500 m ;  200m ; et  100 m. Il y a aussi le débit dont le coût va de 15 000 à 40 000 », explique-t-il. Pour faire face à la concurrence qu’il dit de plus en plus rude, son objectif est de mettre l’accent sur du matériel de qualité et de longue portée.

Tiga Cheick Sawadogo