Déplacées et mendiantes : le double fardeau de certaines femmes à Ouagadougou
Un usager venu donner en offrande un poulet à un mendiant (Ph. Studio Yafa)

Déplacées et mendiantes : le double fardeau de certaines femmes à Ouagadougou

Comme si cela ne suffisait pas, des femmes et leurs enfants, déjà en situation de déplacés, sont obligés de tendre la sébile pour subvenir à leurs besoins. Venant d’horizons divers, on les voit dans les rues, aux feux tricolores à Ouagadougou.  Le choix difficile de laisser de côté sa dignité et mendier, pour ne pas mourir de faim. Dont acte ! Un double fardeau à supporter.

Perdre tout du jour au lendemain ! Son village, son domicile, ses biens, souvent même sa famille, tout !  Alea jacta es ! Que faire ? Des femmes déplacées internes arrivées à Ouagadougou semble n’avoir pas eu à placer un mot.

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Installées aux abords des voies, aux feux tricolores ou encore dans des marchés, il n’est pas rare de voir des femmes seules ou ayant des enfants mendier, pour disent-elles subvenir à leurs besoins.

Kalidjèta a fui l’insécurité il y a deux ans. Jadis résidente d’une localité située à une trentaine de kilomètres de Djibo, elle s’est installée aux abords d’une voie bitumée dans le quartier Tampouy de Ouagadougou pour mendier. Corps frêle, regard lointain, la dame de 35ans est assise à même le sol sur un pagne.

La mendicité, seule source de revenus

Pieds tendus, elle sonde les bonnes volontés en veillant sur ses enfants. Elle conte son histoire : « Nous venons de Naamsiguiya. C’est l’insécurité qui nous a conduits ici. Je suis venue avec mes jumeaux et leur sœur. J’ai quatre enfants restés dans une autre localité. Ici, nous ne pouvons que mendier pour manger et envoyer aux enfants ».

Comme elle, Ramata est arrivée dans la capitale dans les mêmes circonstances. Réduite également à la mendicité à Ouagadougou, Ramata, ancienne résidente de kèla regrette son activité génératrice de revenue. Autrefois restauratrice, elle déplore le manque de boulot qui la pousse dans les rues, livrée au regard et à la pitié de qui se laisse émouvoir par la sébile tendue.

L’avis du sociologue

« Nous savons que la mendicité n’est pas une bonne chose, mais nous n’avons pas le choix. Au village, on faisait l’élevage et la restauration », se confie-t-elle.

Dr Patrice Kouraogo, sociologue, explique la situation. A l’en croire, voir de plus en plus de femmes mendiantes est lié au fait que ce soit la couche la plus vulnérable dans la société. Il pense aussi que le manque d’emploi est une autre cause.

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A écouter les déplacées, le manque d’emploi semble être ce qui a poussé Kalidjèta et Ramata dans les rues. Sans emploi et toutes deux mères de plusieurs enfants, elles doivent pourtant subvenir aux besoins de leurs familles.  Et l’un des dangers auxquels elles sont exposées, c’est la circulation. Elles se retrouvent exposées aux accidents de la route. « (…) souvent des voitures et des motos dérapent dans notre direction et nous fuyons. Si on gagne un travail et quelqu’un pour s’occuper des enfants, on ira travailler et arrêter la mendicité dans la rue », témoigne Kalidjèta.

Il est à noter qu’au Burkina Faso, le Code pénal en sa section 5 article 242 prévient qu’il « Est puni d’un emprisonnement de deux à mois, quiconque, ayant des moyens de subsistances ou étant mesure de se les procurer par le travail, se livre à la mendicité en quelque lieu que ce soit».

Adaptation web par Boureima DEMBELE sur un reportage de Linda OUEDRAOGO