Mali-Burkina-Niger : L’insécurité alimentaire en débat à Maradi

Mali-Burkina-Niger : L’insécurité alimentaire en débat à Maradi

Le Sahel peine à se nourrir. L’autosuffisance alimentaire reste un vœu pieux au Mali, au Burkina et au Niger. Aux inondations, sécheresses, manques d’investissements structurants s’est greffée l’insécurité qui contribue à réduire les espaces de productions. À Maradi, 650 km au sud de Niamey, les trois médias de la Fondation hirondelle au Sahel ont organisé un forum public sur les défis de l’insécurité alimentaire dans les trois pays.

Une convergence entre les quatre panélistes au premier tour de table. Au Mali, au Burkina et au Niger, l’agriculture est la principale activité des populations. Malgré tout, elles n’arrivent pas à se nourrir à cause d’un faisceau de défis. Les programmes et projets ont toujours produit des résultats mitigés, regrette Ousmane Abdou, ingénieur agrométéorologue au ministère en charge de l’agriculture du Niger.

Les panélistes ont proposé des solutions pour faire face à l’insécurité alimentaire, Ph. Studio Yafa

« On a tellement écrit, on doit s’arrêter maintenant et agir concrètement, produire. Le potentiel est là en termes d’eau et de terre », clame l’invité, sous les acclamations du public de l’amphithéâtre de l’université Dan diko Dan Koulodo de Maradi (UDDM). Est-ce un problème de ressources financières ou humaines lui demande Moctar Hamadou, l’un des modérateurs. Oui, mais surtout une question de volonté politique, répond l’ingénieur agrométéorologue.

Une agriculture moins dépendante de la pluie 

Et pourtant, nuance un autre invité, Dr Bill Hassanou enseignant chercheur à l’UDDM. Certaines zones dans les trois pays produisent énormément. Des productions qui pourrissent malheureusement sur place par manque de voie d’accès, d’où la nécessité de « désenclaver certains bassins de production ».

Dr Nouhou Jangorzo également enseignant chercheur à l’UDDM lui pointe du doigt le dérèglement climatique. « Dans les pays de l’AES, l’activité agricole dépend beaucoup de la pluie. Dès qu’il y a pénurie d’eau, certaines zones ne produisent plus », constate-t-il, avant de proposer que les trois pays développent une agriculture qui ne dépend pas seulement des eaux de pluie.

Peu de pluie, récoltes insuffisantes. Mais trop d’eau, moisson est incertaine. Marina Traoré, l’autre modératrice du débat  se saisit de l’actualité des inondations pour demander au Professeur Ibrahim Baoua, enseignant chercheur à l’université de Maradi s’il ne faut pas déjà craindre pour une insécurité alimentaire à la fin de cette saison agricole. Absolument, répond l’invité. Par contre, il note que les inondations sont une réalité  partout. « Au lieu que ce soit des catastrophes, on peut limiter les dégâts en capitalisant, en créant des barrages de captage », préconise-t-il.

Accompagner les producteurs

Sans être pour une politique d’assistance, Dr Bill Hassanou plaide pour un accompagnement des producteurs en intrants. Et pour éviter d’être dépendant de l’extérieur dans ce sens, l’enseignant-chercheur suggère que les trois pays mettent en place des usines de production d’engrais pour fertiliser les champs. « Il faut écouter les producteurs dans leurs besoins », recommande le panéliste. Mais avant tout, il précise également que « l’agriculture pluviale a atteint le plafond » et qu’il faut développer l’irrigation.

Le public a répondu présent en posant des questions, Ph. Studio Yafa

C’est également l’avis de Ousmane Abdou qui penche pour la mise en place de projets de grandes irrigations avec la construction d’ouvrages d’eau. L’autosuffisance alimentaire passe aussi par la consommation locale qui conditionne le devenir de l’agriculture dans l’espace de l’Alliance des États du Sahel, note pour sa part Dr Nouhou Jangorzo. « Nos productions sont plus chères que celle importée. Nos facteurs de production dépendent de l’importation. Les autres pays subventionnent leurs produits. On a commis une grosse erreur en ouvrant nos marchés », se plaint l’invité.

Fortement mobilisé, le public constitué d’étudiants, d’acteurs de la société a participé au débat en posant des questions. Une interaction facilitée par Lala Touré du Studio Tamani.

Retrouvez l’intégralité du débat sur les défis de la sécurité alimentaire au Burkina au Mali et Niger demain samedi sur l’ensemble de nos radios partenaires à travers le pays.

Tiga Cheick Sawadogo