Le rugby, un sport de contact, commence à se faire une place au Burkina Faso. Au quartier Tampouy de Ouagadougou, le Rugby Club Tampouy a décidé de se consacrer à la formation des enfants, dont la plupart rêvent d’une carrière internationale.
Dans la cour du Lycée municipal de Tampouy, des enfants, répartis en deux groupes, s’entraînent sur le terrain nu et poussiéreux. Un ballon ovale est mis en jeu. Les enfants se poursuivent pour empêcher leur adversaire d’avancer et de déposer le ballon dans leur camp. Liliane Somé et Harouna Sawadogo, les deux entraîneurs, observent en donnant des consignes ou en encourageant. Ce n’est pas du football. C’est du rugby, un sport encore méconnu au Burkina Faso. La discipline se joue à 15 joueurs par équipe. Une autre version existe avec sept joueurs par équipes. Ici, à Tampouy, la discipline commence à se faire une place.
Parmi ces joueurs, Maazia Pougraoua fait partie de l’équipe des moins de 12 ans. La pratique du rugby a commencé lorsqu’en classe, un enseignant leur a annoncé la mise en place de l’équipe de rugby. « Je suis venu un samedi, j’ai trouvé que c’est bon et que c’est un jeu collectif. C’est ce qui m’a intéressé », raconte cet enfant. Comme elle, Abdoul Yazid Nael Simporé a rejoint le club après avoir vu une affiche à l’entrée du Lycée municipal. Il décide alors de s’inscrire. « Mon père m’avait dit de trouver un sport à pratiquer pendant les vacances. Donc, quand j’ai vu l’affiche, je suis venu m’inscrire », se souvient-il.

Les difficultés de la pratique du rugby
Cependant, ce sport se heurte à des difficultés. Certains parents ne souhaitent pas que leurs enfants jouent. Silvère Ouédraogo, 16 ans, a tout fait pour convaincre ses parents de le laisser jouer au rugby. « Ils m’ont dit que je peux jouer à condition de ne pas me blesser », fait-il savoir. Les difficultés sont les mêmes chez les filles sinon mêmes plus grandes. « Je ne venais pas aux entraînements tous les jours parce que mon papa refusait que je vienne. Je lui ai expliqué que c’est un sport et que ça me plaît. Il a fini par me laisser venir », explique-t-elle à son tour.
En effet, le rugby a une mauvaise réputation car considéré comme un sport brutal. C’est pourquoi certains parents hésitent à laisser leurs enfants y jouer. L’entraîneure principale du Rugby Club TampouyLiliane Somé, s’implique pour sensibiliser les parents. « Il y a un enfant qui venait, son père disait qu’il mentait parce qu’on ne joue pas au rugby au Burkina Faso », se rappelle-t-elle. Alors, elle a procédé à une sensibilisation pour les convaincre. Elle a convoqué le parent et lui a expliqué ce qu’était le rugby. Depuis lors, ce dernier ne trouve aucun problème à ce que son enfant joue au rugby.
Pour amener les enfants à aimer le rugby, un programme adapté est mis en place par l’encadrement technique. Le principal objectif est de leur apprendre que le rugby est différent du football qu’ils connaissent mieux. « Le rugby ne se joue pas comme au football. Par exemple, au rugby, les passes se donnent en arrière. Donc, il faut d’abord leur apprendre cela petit à petit. Ensuite, on leur apprend comment se positionner », explique-t-il.
La détermination des entraîneurs
Les séances d’entraînements se déroulent trois fois par semaine sur un sol nu, ce qui en décourage certains enfants qui ont peur de se blesser. D’autres jonglent entre plusieurs sports et disparaissent parfois pendant des semaines. « Avec les enfants, il faut vraiment de la patience. Si tu n’as pas la patience, ce n’est pas simple », avoue Liliane, déterminée à ne pas baisser les bras.

Sport peu populaire et dans l’ombre du football, les initiateurs du Rugby Club Tampouy ont pour objectif de combler un vide. En effet, il y a très peu d’équipes de petites catégories au Burkina Faso. « Quand vous prenez tout le Burkina Faso, hormis à Bobo, il n’y a pratiquement pas d’équipe de rugby pour les enfants. Nous nous sommes dit qu’il fallait mettre l’accent sur la relève », poursuit Liliane.
Le rêve d’une carrière internationale
Son collègue Harouna Sawadogo complète : « On a une équipe nationale de rugby mais beaucoup n’ont pas eu de formation à la base. Ce qui fait qu’il y a beaucoup de failles dans le jeu ». Les équipes nationales du Burkina Faso ont participé à plusieurs compétitions de rugby sur le plan continental. Sous la conduite de l’ ancienne présidente de la Fédération burkinabè de rugby, Rolande Boro, elle s’est qualifiée pour la première fois à l’Africa rugby cup, l’équivalent de la deuxième division de la Coupe d’Afrique de rugby.

C’est aussi ce qui justifie le choix du Rugby Club de Tampouy de miser sur la relève. L’objectif est d’amener ces enfants à représenter le Burkina Faso sur le plan international. Le Burkina Faso commence à participer aux compétitions de rugby. Les enfants, quant à eux, en rêvent déjà.
« Je veux évoluer en équipe nationale et voyager dans d’autres pays. Je veux aussi prouver à mon père qu’il a eu raison de me faire confiance », affirme Nael. Il faudra du temps pour y arriver. C’est pourquoi Liliane et Harouna souhaitent l’accompagnement, notamment des parents afin de former les futurs champions de rugby du Burkina Faso.
Boukari Ouédraogo