Ils étaient Koglwéogo quand leur village était en proie aux voleurs de bétail et autres bandits. Cette fois, ils sont enrôlés comme Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) pour faire face aux groupes armés qui menacent pas loin de chez eux. De koglwéogo à VDP, la détermination et l’engagement des habitants de Kaïbo dans la province du Zounwéogo n’ont pas faibli.
Retour d’une mission. La kalachnikov portée en bandoulière, Abdou arbore fièrement une chemise treillis, comme un militaire. Le jeune homme, grand de taille et bien bâti, a la démarche sure et fière. Quand il descend de sa moto en ces lieux qui font office du quartier général, il se met à genou pour saluer des personnes âgées, la main toujours sur son arme. « On était allés résoudre un problème », nous lance-t-il laconiquement sans autre précision quand nous lui demandons où est-ce qu’il était.
Abdou est en réalité un Volontaire pour la défense de la patrie. Il y a quelques mois, il a été choisi parmi plusieurs candidats pour être formé. Armé, il parcourt sa commune avec ses camarades pour des missions.
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Mais dans un passé, pas si lointain, Abdou était un Koglweogo. « Il y a environ 8 ans, notre localité n’était pas du tout calme. Les habitants étaient dépossédés de leurs biens. Entre temps, on a entendu parler des associations de Koglweogo on n’a pas hésité à s’engager. Notre action était essentiellement orientée contre les voleurs de bétail. Vraiment on a réussi à barrer la route au grand banditisme. On a arrêté des centaines de braqueurs pour remettre aux Forces de l’ordre », se rappelle-t-il.
Coiffé de son bonnet rouge, le chef des Koglweogo se rappelle aussi de cette période quand Kaïbo était considéré comme l’un des foyers les plus dynamiques des Koglwéogo au Burkina Faso. « C’est parce que les voleurs étaient là qu’il y avait des Koglweogo. Au temps fort du grand banditisme, on pouvait arrêter 20 malfaiteurs en une journée. Le phénomène a considérablement diminué de nos jours. On peut passer des mois sans attraper un seul », ajoute-t-il.
Vers un nouvel objectif
Alors que Kaïbo est libéré de l’emprise des bandits, une autre menace guette la commune comme c’est le cas partout au Burkina Faso : le terrorisme. Selon le chef des Koglweogo, quand le Gouvernement a lancé le recrutement des VDP, Kaïbo a enregistré beaucoup de candidatures. La conversion s’est faite naturellement.
«Pour les VDP, les gens sont allés s’inscrire. Uniquement dans la commune, il y a eu 264 personnes inscrites. Mais le Gouvernement a le dernier mot et c’est lui qui a choisi qui il veut et il a pris 100. Mais la plupart des 100 personnes choisies sont des anciens Koglweogo. Les autres non retenus sont des réservistes », précise le chef en éclatant de rire.
Abdou a donc suivi une formation d’un mois. Et selon lui, c’est un devoir de participer à la défense de sa commune et un honneur de porter une Kalachnikov. « Notre commune accueille des déplacés internes. Ils étaient chez eux tranquillement, sur la terre de leurs ancêtres et on les a chassés. On s’est alors dit que si on ne s’organise pas, on pourrait du jour au lendemain quitter Kaïbo aussi », déclare-t-il, l’air sérieux.
Légitime comme un VDP
Souleymane Compaoré lui n’est pas VDP. Cet ancien Koglweogo qui présente des débuts de cheveux grisonnants se présente comme un conseiller des plus jeunes qui vont à l’assaut de nouveaux défis. Pour lui, c’était tout à fait normal que des Koglweogo acceptent de s’engager comme VDP. « C’est dans le même sillage que la mission des Koglweogo. Tout ça concourt à ce que nous puissions vivre paisiblement », dit-il.
Par contre Abdou, voit bien une différence entre les deux missions. Et c’est du point de la légalité « Le Koglwweogo n’était pas encadré, mais vous voyez qu’il y a une loi qui encadre les VDP en plus nous avons été formés. On nous a remis des armes, comme celle que je tiens. Avant, ce sont des fusils rudimentaires qu’on tenait », précise-t-il.
Abdou et les autres VDP regrettent, par contre, la faiblesse des moyens qui leur sont alloués. Ils continuent d’utiliser leurs propres motos pour les missions de patrouilles et par manque de carburant certaines sorties de sécurisation tardent.
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Tiga Cheick Sawadogo