Chaque candidat à l’élection présidentielle propose son arsenal de mesures face au péril terroriste. Avec plus de 3000 morts, des milliers d’écoles fermées, plus d’un millions de déplacés internes et surtout un pays qui ne contrôle plus l’ensemble de son territoire, l’insécurité est une plaie béante que tous les prétendants au fauteuil de Kossyam se proposent de soigner. Regard croisé sur les thérapies anti terroristes dans les programmes de société.
Avec Zéphirin Diabré président, une pluie de feu va s’abattre sur les terroristes qui ont mis le Burkina Faso en mal ces cinq dernières années. C’est du moins ce que le candidat propose dans son programme. Le candidat de l’Union pour le progrès et le changement (UPC) a baptisé son offensive antiterroriste : « Bugum saga », pluie de feu en langue mooré. « Avec cette doctrine, nous entendons faire pleuvoir le feu sur ceux qui nous attaquent ou planifient de le faire. C’est notre concept de dissuasion cumulative, que nous appelons aussi dissuasion totale», lit-on dans le programme. Selon le Pr Idrissa Ouédraogo, Secrétaire national chargé des études, la prospective et de la mobilisation des experts, par ailleurs chargé du programme présidentiel de Zéphirin Diabré, les propositions du candidat en matière de sécurité sont regroupées en 5 axes. « Le leadership stratégique au sommet, revoir l’architecture nationale de la sécurité, réorganiser les capacités d’organisation des forces de défense et de sécurité pour leur rendre plus efficace, compter sur la résilience des populations, développer une coopération, créer une synergie ».
Pendant ce temps, le président sortant et candidat Roch Kaboré, propose de « poursuivre la restructuration de la défense nationale pour disposer d’une armée républicaine, bien entraînée, bien équipée et apte à défendre l’intégrité du territoire national et à assurer la protection et la sécurité des Burkinabè au regard des nouvelles menaces sécuritaires ». Larba Issa Kobyagda, membre de l’équipe de rédaction du programme et de l’équipe de campagne du candidat explique que s’il est réélu, durant la période 2021-2025, « Le président s’engage à injecter environ 8000 milliards F CFA pour garantir la sécurité à la fois dans l’espace territorial du Burkina, mais aussi contribuer à permettre aux autres pays, notamment ce qu’on appelle la logique des trois frontières (Burkina-Niger-Mali) d’apporter leur concours pour une meilleure sécurisation de nos populations ».
Le renseignement avec Eddie, des drones avec Roch
Celui qui se considère comme l’héritier de l’ex-président Blaise Compaoré, a lui aussi son remède pour venir à bout des groupes armés terroristes. Tirant leçon des 27 ans de gestion du pouvoir par son parti, Eddie Komboïgo compte mettre l’accent sur le renseignement. « Pourquoi au temps de Blaise Compaoré, il n’y avait pas d’attaques terroristes. Parce le pays disposait d’un réseau de renseignement très équipé qui anticipait. Il ne s’agit pas de prendre le pouvoir, s’asseoir à Kossyam pour boire le champagne et dire qu’on est chef de l’Etat, c’est honteux. Il faut bander les muscles, dissuader. Il faut un réseau de renseignement qui anticipe sur les actions. Il ne faut pas les laisser agir avant de contre attaquer. Il faut les empêcher d’agir », envisage-t-il.
En outre, la technologie sera explorée pour traquer les terroristes. Larba Issa Kobyagda évoque la possibilité pour le Burkina de recourir aux drones, en partenariat avec d’autres pays, si Roch Kaboré est réélu. « Pour mieux surveiller un territoire, il n’y a pas mille et une solution. La technologie nous montre qu’il faut forcément des drones. Acquérir des drones, c’est beaucoup d’argent. Acquérir des drones par pays peut ne pas être utile, puisque si le drone peut balayer un rayon de 1000 km, pourquoi en vouloir pour chacun des pays. Mais il faut déjà que la négociation puisse se mener à un très haut niveau, que les chefs d’Etat s’accordent, c’est le plaidoyer que le chef de l’Etat s’est donné comme engagement à faire ».
Des volontaires recadrés avec l’UPC…
L’idée de recruter des volontaires pour la défense de la patrie (VDP) n’est pas une mauvaise en soi, selon le candidat de l’UPC, Zéphirin Diabré. Par contre, son chargé du programme présidentiel, Pr Idrissa Ouédraogo, émet un bémol. « A notre humble avis, ça n’a pas été bien traité. Si vous amenez des gens qui n’ont aucune formation, et que vous mettez des armes dans leurs mains, ça peut créer des situations dramatiques. On a vu des situations où il semblerait il y a eu des exactions de la part de ces forces. Il aurait fallu murir encore plus la question avant de l’implémenter, de la mettre en œuvre sur le terrain ». C’est que l’UPC fera si son candidat remporte l’élection présidentielle.
Quant à Roch Kaboré, s’il bénéficie d’un nouveau bail, les VDP seront mieux structurés. « Ces acteurs seront mieux formés, mieux renforcés, mieux encadrés sur les droits humains de manière de leur permettre de jouer leur rôle d’auxiliaire de défense et de sécurité. Protéger, partager l’information, en attendant que le dispositif global puisse se mettre en place », penche Larba Issa Kobyagda, membre de l’équipe de rédaction du programme de Roch Kaboré
De la négociation avec les terroristes
La question est gênante, mais certains candidats n’écartent pas cette éventualité. A l’UPC par exemple, tout ce qui peut permettre de préserver la vie d’un burkinabè est prenable. Mais auparavant, il faut des préalables. « On ne peut pas dire, fontaine je ne boirai jamais de votre eau. C’est le terrain qui détermine la stratégie. Il faut savoir être celui qui tient les ficelles dans ces négociations. Il ne faut pas aller négocier et perdre son âme, céder l’essentiel aux autres. A priori on ne peut pas dire qu’on ne va pas négocier avec qui que ce soit », argumente le Pr Idrissa Ouédraogo, Secrétaire national chargé des études, la prospective et de la mobilisation des experts du parti du Lion.
Chez le candidat du MPP par contre, la négociation avec les groupes terroristes n’est pas une option. « Ce n’est pas une question de personnes étrangères qui attaquent le Burkina Faso. Il y a forcément des Burkinabè enrôlés dans le processus. L’idée c’est d’arriver à rompre le cycle de contamination et procéder à la déradicalisation des Burkinabè qui ont été mis dans le processus. L’idée d’en arriver à un point de négociation avec les terroristes, n’est pas envisagée au premier rang », martèle pour sa part Larba Issa Kobyagda.