Au secteur de n°4 de Manga dans la région du Centre-Sud, Véronique Compaoré tient un « cabaret-restau. Cette dame est née avec un handicap qu’elle a su dompter. Entre les travaux ménagers et son commerce de vente de dolo et de riz, la mère de deux enfants est une boule d’énergie qui suscite l’admiration par le courage qu’elle incarne.
On se croirait dans un débit de boisson communément appelé « maquis ». Ou encore dans un de ces nombreux restaurants de fortune qui pullulent aux abords des grandes voies. La tenancière, Véronique Compaoré est une femme handicapée qui en plus de la vente du dolo, prépare plusieurs mets pour satisfaire sa clientèle.
La béquille tenue par la main droite, Véronique Compaoré ne tient pas tranquille dans son cabaret. Quand elle ne sert pas à boire dans une calebasse à un nouveau client, c’est du riz ou de la soupe de feuilles de choux qu’elle apporte à ses quelques clients assis çà et là sur des bancs. «Je ne peux pas cultiver, donc je me concentre sur mon commerce. J’ai des enfants à nourrir», nous lance la mère de deux enfants qui nous confie par ailleurs attendre un troisième enfant.
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Pour le nouveau visiteur, cette activité incessante peut sembler pénible. Mais pour la concernée, il n’en est rien. « Mon handicap, je vis avec sans véritable soucis, parce que je suis née avec. Ce n’est pas suite à un accident que j’ai perdu l’usage de ma jambe. Il y a une association d’aide aux handicapés qui a voulu me donner un vélo tricycle, j’ai refusé, parce que cela allait réduire considérablement mes mouvements», dit-elle dans un sourire qu’elle arbore permanemment, avant de préciser qu’elle peut bien aller à vélo et conduire une moto.
La petite touche de Véronique
A Manga, des cabarets comme celui de Véronique, il y en a à la pelle. Les jours de marché surtout, il faut user de stratégie commerciale pour appâter et fidéliser la clientèle qui a l’embarras du choix. Alors la jeune mère de famille joue de la musique, ce qui est inhabituel dans les cabarets.
« Mon cabaret est un véritable endroit de rendez-vous. Vous savez, les gens aiment là où il y a de l’ambiance. Le soir, ici c’est comme un maquis. Et souvent, il y a des gens qui ne boivent pas, mais viennent s’asseoir juste parce qu’il y a la bonne humeur. Et souvent, le dolo finit, mais les gens ne veulent pas partir», explique Véronique qui ajoute quitter souvent son « bureau » entre 22h et 23h.
Pas le temps de s’apitoyer sur son sort
Femme au foyer, Véronique s’acquitte chaque matin de ses travaux ménagers avant de partir pour son restau-cabaret. Une fois sur place, commence la corvée d’eau, le nettoyage, l’approvisionnement en dolo « Et là, la cuisine peut commencer», dit-elle. C’est un trin trin quotidien depuis plus de 20 ans.
Aide vendeuse de dolo depuis son jeune âge, elle avait décidé de s’installer à son propre compte. « J’ai commencé ce travail par la friture des patates et des ignames que je vendais sur une petite table. J’aidais aussi les vendeuses de dolo», se rappelle-t-elle.
Il arrive à Véronique de penser à son handicap. Notamment ce qu’elle aurait pu faire sur ses deux jambes. Une tristesse qu’elle balaie rapidement de ses pensées. «Mais je ne reste pas longtemps triste, je me ressaisis très vite en me disant que je m’en sors mieux que certaines personnes. Je ne suis pas la plus à plaindre», se console Véronique.
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Fidèle parmi les fidèles, Céline Zoungrana connaît Véronique depuis le bas-âge. «Je la connais depuis longtemps, nous avons grandi ensemble. Quand je la regarde travailler, je vraiment contente, admirative. C’est une source de motivation», se réjouit l’amie de la dolotière.
Tiga Cheick Sawadogo