La fête c’est vendredi ou samedi ? Question ! il y a un doute qui plane pratiquement chaque année sur la date de cette fête. Comment alors préparer une fête dont on ignore presque le jour ? Des femmes rencontrées dans des marchés expliquent comment elles se préparent. Les condiments sont achetés et mis au congélateur en attendant la lune.
Les musulmans du Burkina Faso et d’ailleurs ont débuté le jeûne de Ramadan depuis le 23 mars et sont en passe de le déterminer. Mais, il y a une sorte d’incertitude sur la date de la fête, cette année, comme pratiquement chaque année. Pour cette raison ou pour une autre, l’ambiance dans certains marchés de Ouagadougou était morose ! Aucune affluence pour un jour qui est peut-être une veille de fête. Comme un jour ordinaire ! Une vendeuse de légumes à Zabr-Daaga, un marché en centre-ville de Ouagadougou, le confirme : « Il n’y a pas le marché. Vous-mêmes vous voyez ! Ce sont les voitures qui circulent seulement ! Il n’y a pas le marché. Nous sommes assis, on regarde seulement. On ne sait pas comment va se passer la fête. Mais on demande seulement qu’il y ait la paix au Burkina Faso ».
« Le marché là ressemble à terrain de foot, tellement c’est vide »
Même son de trompette à Nabi Yaar, aux 1200 logements, avec une vendeuse d’habits : « On ne sait même pas quoi dire. Regardez le marché, il n’y a personne, alors que chaque année, à cette heure il n’y a même pas de place pour s’asseoir. Alors que cette année, on dort ici même ! Au moins le matin des femmes sont venues faire tresser les enfants et ont acheté de petits trucs, mais le soir c’est pire. Le marché là ressemble à terrain de foot, tellement c’est vide. Il n’y a personne! Rien ne s’achète ! ».
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D’un autre côté, les populations sont dans l’attente de la lune qui annoncera la date de la fête. Dans cette attente marquée d’incertitude, certains préfèrent déjà faire les emplettes.
Une mère de famille rencontrée au marché de Gounghin nous confie qu’« en venant au marché aujourd’hui, ça diminue les courses. Ça me permet de me reposer aussi ! Je prépare ma fête bien avant et c’est tout ! Si ce n’est pas demain vendredi la fête, je vais conserver les condiments au congélateur. Donc que ça soit demain ou après demain, je conserve tout au congélateur ». Dans le même marché, une veille dame nous assure que si c’est vendredi la fête, « on va remercier Dieu, pourvu que ça arrive nous trouver en bonne santé. Même si ce n’est pas demain, c’est pareil !».
« C’est fatigant de préparer une fête dont on ne connait pas le jour »
Pour madame Téra venue faire le marché à Gounghin, « si ce n’est pas demain la fête, je vais pré-cuir ce que j’ai acheté et conserver pour le jour de la fête. Il y a certains condiments comme les tomates qui peuvent se gâter, on fera de la place au frigo pour conserver. C’est fatigant de préparer une fête dont on ne connait pas le jour ».
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Selon l’imam Séni Sana du Cercle d’Etudes, de Recherches et de Formation islamique (CERFI), « Ramadan est lié à la lune ». Il explique qu’il faut « observer la lune. Si on la voit, on jeûne pour le début de mois de Ramadan ou on fête pour marquer la fin de Ramadan. A en croire l’imam, « le mois de Ramadan obéit à un certain nombre de règles concernant le début et la fin du jeûne ». Dans un Hadith du Prophète Mohammed, il est écrit, cite l’imam, : « Jeûnez à sa vision, rompez à sa vision » pour dire que le jeûne doit débuter avec la vision de la lune ». « C’est ainsi que les musulmans au 29e jour du mois de Chaabane (NDLR 8e mois du calendrier hégirien, mois qui précède le mois de Ramadan), vont chercher la lune. S’ils l’aperçoivent, ils jeûnent le lendemain. S’ils ne voient pas ils complètent le mois à 30 jours pour jeûner un jour plus tard. Pareillement vers la fin du jeûne, le 29 jour, ils vont observer la lune. S’ils l’aperçoivent, la fête c’est le lendemain, au cas contraire, on complète le mois de jeûne à 30 jours », a fait comprendre l’imam.
« (…) si un pays voisin voit la lune, on peut également s’aligner »
Séni Sana précise que c’est la règle, la plus courante et la plus appliquée, situant les divergences à la question de savoir s’il faut forcément observer la lune par soi-même. Sur ce point, l’imam fait savoir qu’ « au niveau du Burkina Faso, on a choisi de voir la lune, à partir du sol burkinabè. C’est-à-dire que la règle qui a été choisie au Burkina, c’est que la lune doit être aperçue au Burkina pour être considérée comme avoir été vue». Toutefois, d’autres règles existent, selon l’imam, comme le fait « de se dire que si un pays voisin voit la lune, on peut également s’aligner pour dire que s’ils ont pu voir la lune, ça peut également, nous concerner. Il y a aussi l’aspect de la vision dans n’importe quelle localité de la terre. A ce moment si un pays dans le monde voit la lune, on peut considérer qu’on a aperçu la lune et commencer le jeûne ou faire la fête de fin de Ramadan».
Le calcul astronomique…
« L ’astronomie est utilisée par certains musulmans. Ceux là peuvent communiquer la date de la fête avant même la fin de la période de jeûne », a avancé l’imam, précisant que cette piste n’est pas approuvée par tous les savants musulmans.
Séni Sana estime aussi qu’«il y a souvent une sorte d’impatience surtout pour la fin de Ramadan. Et quand la fête peut donner lieu à un jour férié pour certaines personnes, celles-ci vont accompagner toute opinion tendant à faire de la fête le jour qui les arrange ». L’imam a invité, pour éviter toutes discussions sur les dates de début ou de fin de Ramadan, à se fier à la Fédération des Associations islamiques du Burkina (FAIB).
Boureima Dembélé et Salimata Barry (Stagiaire)