Karma : des rescapés obligés de dormir à la belle étoile après le cauchemar

Karma : des rescapés obligés de dormir à la belle étoile après le cauchemar

Après le drame intervenu à Karma, où des civils ont été tués, c’est le sauve-qui-peut pour les survivants. Des personnes âgées et des enfants ont marché jusqu’à Ouahigouya situé à plus de 20 km. Certains rescapés dorment à la belle étoile. Le défi pour tous, c’est de revivre après le cauchemar vécu.

En grand ou petit groupes, des baluchons sur la tête, des couchettes et autres matériels dans des charrettes ou tricycles, certains rescapés de Karma rentrent à Ouahigouya par vagues successives. Les enfants de moins de 5ans marchent difficilement.

C’est ce spectacle que les populations de Ouahigouya observent sur l’axe Ouahigouya-Titao, route conduisant au village de Karma. La voix tremblotante, I. Gassambé, un rescapé, se remémore le cauchemar du 20 avril. «Une fois arrivés dans le village, les hommes armés, arborant des tenues militaires, ont demandé les pièces d’identité des habitants. Ils nous ont indiqué un lieu de rassemblement.  Et nous nous sommes assis. Quelques instants après nous avons entendu des coups de feu. Et après un de ces hommes nous a apporté de l’eau à boire. Puis il nous a dit de quitter les lieux » raconte le jeune homme, la vingtaine.

Pieds nus, les vieilles ont marché à travers la brousse

M. Bouda, environ 70 ans, n’a pas l’esprit tranquille. Visiblement toujours sous le choc, elle regrette de n’avoir pas pu formuler les bénédictions à l’endroit de ses petits-enfants, le jour de la fête du ramadan. La septuagénaire, les larmes aux yeux, les pieds nus, bras croisés raconte sa traversée du désert après la survenue du drame. « J’ai souffert de soif. Je ne savais où rentrer. Et me voilà ici. Si je parle trop, je vais couler des larmes. Deux sacs de mil que mes enfants m’ont offert, c’est rester là-bas. Il y a mes petits-fils que je ne vois toujours pas, sont-ils encore en vie ? », se demande la vieille femme, le regard perdu.

Pour l’instant à Ouahigouya, ville qui accueille des rescapés de Karma,  il n’y a pas de système formel de prise en charge des nouveaux déplacés. « Nos blessés sont toujours à l’hôpital. Pour le moment personne n’est venu à notre secours. J’ai juste entendu dire que celui qui devait voir notre cas est en déplacement hors du pays » confie le sexagénaire L. Gassambé qui dit avoir eu la chance de d’échapper aux tueries avec ses deux femmes et ses quatorze enfants.  

Un refuge à la belle étoile
Une vue de la cour qui accueille les rescapés

Dans une cour au secteur 1 de Ouahigouya, une centaine de personnes a trouvé refuge. La seule maisonnette de la cour recueille la plus âgée et les quelques effets personnels qu’ils ont pu sauver.

 Tous les autres dorment à la belle étoile. Ce midi, 5 femmes sont à la cuisine. Parmi elles, M. Sawadogo qui s’inquiète. « Nous ne pouvons pas prétendre que chacun mangera à satiété. L’essentiel c’est qu’il ait quelque chose à se mettre sous la dent. Il y a trop de monde. Ce midi nous préparons du haricot au riz», nous apprend-t-il.

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Le 21 avril, un communiqué du tribunal de grande instance de Ouahigouya indiquait qu’une soixantaine de personnes avaient été tuées à Karam. Des ressortissants de Karma dans un communiqué datant du 25 avril faisaient eux, état « plus d’une centaine de morts ». 

Ce 27 avril, le gouvernement par le truchement du ministre en charge de la communication a annoncé des «dizaines de personnes » qui ont péri dans l’attaque tout en rassurant « l’opinion nationale et internationale qu’il fera absolument tout ce qui relève de ses prérogatives pour la manifestation totale de la vérité dans ce drame ».

Une enquête a été ouverte par le parquet du TGI de Ouahigouya.

Patrice Kambou

Correspondant