Au Burkina Faso, des personnes vivant avec un handicap regrettent que la journée internationale qui leur est dédiée soit passée dans l’indifférence quasi générale.
Un calme mélancolique règne au Centre national des personnes handicapées moteurs de Ouagadougou. A l’entrée du centre, des jeunes femmes et hommes dans leurs fauteuils roulant devisent sous un hangar. Un jour comme les autres sauf que ce 3 décembre est célébrée la journée internationale des personnes vivant avec un handicap. Dans son fauteuil roulant un peu à l’écart, Adama Rouamba observe les rares visiteurs du jour.
A la question de savoir comment passe-t-il sa journée du 3 décembre, Adama Rouamba marque d’abord un silence. « Nous l’avons déjà célébrée avant le jour-j. Les autorités du pays l’ont couplée au forum national des personnes handicapées à Ouagadougou au cours duquel nous avons été reçus brièvement par le président du Faso Roch Kaboré (…) », explique Rouamba. Il regrette que la célébration de la journée ait perdu son lustre d’antan. « Avant on ne se sentait pas exclu. On ne craignait rien. On mettait même des véhicules à notre disposition et nous avions le choix d’une localité pour célébrer la journée. Et au cours de la journée on organisait des conférences, des panels, des projections de films, des expositions pour magnifier les œuvres artistiques des personnes handicapées », se rappelle Adama Rouamba.
Un véritable moment de communion entre différentes catégories de personnes vivant avec un handicap, note-t-il. Par exemple poursuit-il : « les handicapés moteurs et ceux visuels sont comme des parents à plaisanterie. Quand on se rencontre à ces occasions, on se moque l’un de l’autre. Nous les appellons » sans phare » et eux nous traitent de « sans roue » ».
Thérèse Béré, tisserande est également nostalgique de cette période. Elle déplore le silence autour de leur journée cette année. Cela est signe d’oubli d’une catégorie de personnes très souvent marginalisées poursuit-elle. « La journée est passée inaperçue. On ne sent rien. Pourtant ce sont des occasions pour nous de communier et de se soutenir. Souvent tu penses que tu es seule à être dans une telle situation mais quand tu vois les autres, tu t’armes de courage pour avancer », note la jeune dame.
Clarisse Nikiéma enfonce le clou. Pour elle, l’inclusion que clament les autorités reste un discours creux sans réelle volonté. « Si on considérait les handicapés on devrait marquer la journée par un évènement pour interpeller les citoyens à l’équité et à plus d’égalité », tempête la mère de 2 enfants. L’accès aux services publics ou privés, aux bus de transport, aux toilettes publiques, etc. restent toujours un calvaire pour des personnes comme elle, énumère Clarisse.
La journée internationale des personnes handicapées devrait être « une halte pour la réflexion sur une inclusion effective de ces personnes dans la société », appelle de ses vœux Adama Rouamba, secrétaire général du comité de gestion du centre. En plus de son regret face au silence qui entoure le 3 décembre, il ne cache pas sa déception quant à la suspension de la subvention pour le fonctionnement du centre qui selon lui, demeure un cadre de rencontre et d’apprentissage au métier de tisserand et du tissage pour de jeunes vivant avec un handicap.