De jeunes ouagalais disent avoir été surpris par la nomination de Zéphirin Diabré comme ministre d’Etat en charge de la Réconciliation nationale et de la cohésion sociale. L’ancien chef de file de l’opposition politique est néanmoins attendu au pied du mur.
Au centre-ville de Ouagadougou, ce 11 janvier, par petits groupes, des jeunes discutent. Pour la plupart vendeurs de téléphones et accessoires, ils ne se font pas prier pour se prononcer sur la nouvelle équipe gouvernementale dont la composition a été annoncée la veille. Les jeunes commerçants se lancent des piques dans une ambiance détendue. « Zéphirin est dans la soupe. Zéphirin a rejoint le MPP », lance un jeune vendeur de téléphone militant du CDP à son voisin militant du MPP.
Madi Bagagnan, paré dans son tee-shirt estampillé CDP, principal parti d’opposition, se dit étonné de la nomination de Zéphirin Diabré comme ministre, alors que, poursuit-il, le promu s’est toujours opposé. Du coup, Madi ne cache sa déception face à cette nouvelle alliance entre les désormais anciens adversaires politiques. « Mais c’est la politique. Ce n’est pas grave », lâche le jeune homme. Le jeune commerçant espère que Zéphirin Diabré va travailler avec sincérité et honnêteté sur cette question de réconciliation notamment sur le retour de l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré, et l’ensemble des exilés.
« Zéphirin Diabré est à un poste où il devrait être absolument. Il est l’homme pour la résolution des différentes crises qui ne font que retarder le pays dans son élan de développement », se convainc Abdoul Karim Sana, commerçant. La présence de Zéphirin Diabré dans le nouveau gouvernement apaisera beaucoup de tensions selon le commerçant qui ne doute pas de ses capacités à relever le défi de la cohésion sociale au Burkina.
Ce n’est pas l’avis de Abdoul- Karim Soulga, étudiant en anglais. Pour lui, pas besoin d’un ministère spécialement dédié à la réconciliation nationale. La réconciliation, avance-t-il, découlera naturellement d’une véritable justice. « Combien de dossiers de crimes de sang, économique sont toujours pendants en justice », se demande le jeune étudiant. « Je doute fort qu’on aboutisse à une réconciliation nationale et une cohésion sociale tant que ce sont des amis qui s’invitent toujours à la table pour souper », ajoute l’étudiant, pessimiste.
Rabiatou Sawadogo, également étudiante, regrette la création d’un autre portefeuille ministériel alors qu’il est question de plus en plus de diminuer le train de vie de l’Etat. « A quoi serviront désormais le Médiateur du Faso, le Haut conseil pour la réconciliation et l’unité nationale (HCRUN) et le Conseil économique et social avec la mise en place d’un ministère en charge de la réconciliation nationale et de la cohésion sociale ? », s’interroge la jeune étudiante. Elle craint de ce fait, une autre institution budgétivore sans impact réel sur la vie des citoyens.
Dans une tribune publiée sur lefaso.net le 30 septembre 2020, Zéphirin Diabré déclinait sa vision de la réconciliation nationale en ces termes : « La construction de la réconciliation nationale doit se faire sous le triptyque vérité-justice-réconciliation. Pour cela, il conviendra de rassembler toutes les forces-vives de la nation pour réfléchir sur la trajectoire à baliser pour le retour de la paix et la réconciliation. L’intérêt supérieur de la Nation doit nous rassembler en dépit de nos divergences idéologiques et politiques ».