Juché sur le toit d’un mini bus communément appelé ‘’dina’’ ou assis à côté du chauffeur, Francis Koussalgo trace sa voie dans le transport de passager. L’apprenti chauffeur de 23 ans a abandonné les classes au Ghana. En attendant d’être ‘’rodé’’ et d’avoir son propre véhicule, la vie du jeune Francis se conjugue en aller-retour entre Ouagadougou et Tiébélé à proximité de la frontière ghanéenne.
Il est presque 15h 30 à la gare routière de la Patte d’oie, dans la capitale burkinabè. Les bruits des klaxons des véhicules se mêlent au brouhaha des usagers. Francis Koussalgo est à côté d’un mini bus, appelé ‘’dina’’. L’air pressé, il décline d’abord notre sollicitation arguant le retard. Il doit bouger à 15h30 pour Tiébélé, via Pô dans la province du Nahouri, région du Centre-Sud Burkinabè. Francis finit par nous accorder quelques minutes. « J’ai fréquenté au Ghana, donc mon français est un peu bizarre », nous prévient-il, en s’esclaffant de rire. Apprenti chauffeur du mini car estampillé « Ouezena (l’aide de Dieu, en langue kasséna), il dit être arrivé en apprentissage il y a environ 5 mois.
Le manque de moyen et des résultats scolaires jugés insatisfaisants l’ont amené à abandonner les cours. « J’ai fréquenté, mais entre-temps ça n’allait pas au niveau de l’argent, et puis je ne travaillais pas bien, c’est mieux de laisser et se chercher », explique Francis. La vie d’un apprenti chauffeur n’est pas facile, mais notre interlocuteur ne s’en plaint pas pour autant. Le matin quand il arrive à la gare, son programme du jour est tout tracé. Balayer l’intérieur du véhicule, nettoyer les vitres. « Quand les clients sont installés, je m’assoie, je protège bien les bagages et je prends l’argent », poursuivit-il.
Tantôt dans le véhicule, tantôt sur le toit de la locomotive, le jeune apprenti s’accommode à toutes les situations. « Souvent je m’assoie en haut, ça ne me gêne pas. C’est très risqué, mais on va faire comment ? », se demande-t-il avant d’ajouter que c’est quand le mini bus est plein qu’il prend ce risque, en vue de mieux rentabiliser le voyage. « Si le car est plein, comme on veut beaucoup d’argent, je cède ma place et je monte sur le toit du véhicule. Je n’ai pas encore eu de problème sur le toit et je ne souhaite pas en avoir, il y a beaucoup de vent », nous conte l’apprenti.
Nettoyer le véhicule, s’assurer de la propreté des vitres, faire monter les bagages, encaisser les frais de voyage, descendre les bagages et se rendre disponibles aux sollicitations du patron durant le trajet… Quand Francis fait le ratio entre la liste de ses tâches et ce qu’il gagne en retour, il se fait moins enthousiaste. « On peut avoir 2000 ou 3000 FCFA par voyage. C’est avec cela que je me nourris, je m’habille(…) avec le travail que je fais, je pense que j’aurais pu avoir plus. On a beaucoup de départs », constate le natif de Tiébélé.
En faisant monter les bagages, par inadvertance, il arrive que le jeune apprenti casse des objets fragiles. « Les propriétaires des bagages se plaignent, on s’excuse », dit-il d’une voix calme.
Son patron Matani Badagbou dit apprécier son travail. Pour lui, Francis, est comme un petit frère et les sauts d’humeur entre eux sont gérés à l’amiable. « Il vient de faire son permis, il est venu me voir pour avoir la main. Souvent j’essaie de lui faire comprendre certaines choses, il se gonfle, moi je n’aime pas parler beaucoup », fait-il savoir. Tous les jours sur les 180 km qui séparent Ouagadougou à Tiébélé, le jeune apprenti de 23 ans trace ainsi sa route de futur conducteur auprès de son patron. « Je conduis souvent, il (Ndlr. Patron) me donne le volant. C’est parce que je n’ai pas encore mon propre véhicule, sinon je conduis très bien. J’ai des projets, si je gagne de l’argent, je vais acheter mon véhicule et être mon propre patron », envisage Francis.