Le sujet de la pléthore de festivals au Burkina Faso était sur la table de Ya’Débat cette semaine. Certains invités sont formels : la plupart des festivals ne servent à rien, ils ne participent aucunement à la promotion de la culture. Pour eux, ce sont juste des festivals de bière qu’il faut supprimer. D’autres intervenants au débat estiment par contre que ces rendez-vous sont le signe d’une vitalité culturelle à encourager.
Pas de cadeau entre les invités de Ya’Dabat. Artiste musicien et promoteur du festival pour l’unité nationale, Bass Mandelson soutient que son initiative participe à la consolidation de la cohésion sociale. « J’ai vu que mon pays a un problème d’unité, il y a trop de haine, les gens s’entre-déchirent. J’ai fait mon festival, pas pour gagner de l’argent(…) Le Burkina est déchiré actuellement, on appelle les gens à se pardonner », explique-t-il. Dr Jacob Yarabatioula, enseignant chercheur et écrivain le traite d’opportuniste. « C’est de l’opportunisme pure. Il a saisi une situation de notre pays déchiré pour créer son festival. Si le contexte s’améliore, tu disparais », lui lance-t-il.
Son vis-à-vis se défend avec véhémence. « Non, non je ne vous laisse pas dire….en temps de guerre ou de paix on a besoin d’unité nationale», rétorque l’artiste promoteur du festival. Le plateau s’anime. Chaque invité veut placer son mot, quitte à ne plus écouter l’autre. Le modérateur Souleymane Koanda invite à l’apaisement.
Alassane Kéré, journaliste culturel ne se fait pas d’illusion. Observateur averti de l’univers des festivals, il arrive à la conclusion que ce sont en réalité des niches d’argent. « Il y a beaucoup à gagner, il y a de l’argent, il y a des festivals qui ne répondent à rien du tout », explique l’invité qui regrette que ces « faux» festivals nuisent aux « vrais » festivals en termes de mobilisation de ressources auprès des partenaires et des pouvoirs publics. Pour lui, ces rendez-vous, pour la plupart, ne participent pas à la promotion de la culture. « Il faut dire que ce sont des maquis géants. On met juste le nom de festival, mais ce sont des maquis », ajoute le journaliste.
Quel impact sur la culture ?
Quand Souleymane Koanda demande à ses invités si les festivals impactent positivement la culture burkinabè, le plateau se surchauffe une fois de plus. Bass Mandelson est convaincu que le festival pour l’unité nationale au regard du monde qu’il draine à Bobo a un impact. Mais son vis-à-vis ne semble pas convaincu. « C’est le type de festival où il n’y a pas d’indicateurs d’efficacité. Vous faites les choses, mais vous n’étudiez pas pour savoir si ça apporté quelque chose par rapport à ce que vous voulez au sortir du festival », attaque Dr Jacob Yarabatioula.
« On peut mesurer avec quoi ? » demande, Bass Mandelson. Il y a des outils pour cela, répond l’enseignant chercheur. « Moi j’ai fait l’école de la rue. Ça ne s’apprend pas à l’école. Tu peux avoir mille diplômes, mais ça n’a rien à voir(…) Je m’organise avec mes propres fonds, ce ne sont pas vos fonds, ce ne sont pas les fonds de l’Etat », réplique l’artiste pendant que le modérateur s’interpose une fois de plus pour calmer les invités.
Alassane Kéré plaide pour un assainissement du milieu des festivals au Burkina. Il le faut, clame-t-il, pour barrer la route à certains qui n’ont aucun impact, mais qui causent des nuisances sonores et autres désagréments. L’enseignant chercheur n’est pas de cet avis parce que selon lui, les textes fondamentaux du Burkina n’interdisent pas à une personne ou à un groupe de personne de mener une activité culturelle, artistiques. Il soutient que le festival est une plateforme, une offre de diffusion qui regroupe des milliers de festivaliers. Il invite à la réflexion pour trouver le bon filon dans ces grands regroupements pour la promotion de la culture.