Inauguré le 29 novembre 2022, à Tenkodogo dans la région du Centre-Est, le Centre Mère-enfants s’occupe de la prise en charge intégrée des femmes victimes de Violences Basées sur le Genre (VBG). Le centre sort de l’ordinaire car, il est unique en son genre. En plus des soins médicaux, il intègre une prise en charge psychologique, un accompagnement juridique tout en offrant gîte et couverts aux victimes.
Dans son rapport d’analyse (1er janvier au 30 juin 2022) de la situation de la violence basée sur le genre au Burkina Faso (VBG), le Sous Cluster (AoR) VBG du Burkina Faso a constaté une augmentation de 54% des cas rapportés en 2022 comparativement à la même période en 2021. Sur la même période, la région du Centre-Sud est à 5,9% des cas de violences basées sur le genre rapportés.
Or, il est ressorti de l’analyse du cluster que 85% des survivants de viol n’ont pas reçu une prise en charge clinique appropriée dans le délai de 72 heures après l’incident. Également, il a été révélé que seulement 1% des survivants ont eu accès à des services juridiques/judiciaires. Ces données posent clairement la nécessité de mettre en place des structures pour la prise en charge des violences basées sur le genre (VBG), à défaut d’arriver à zéro VBG.
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Le Centre Mère-enfants de Tenkodogo répond à ce besoin dans la région du Centre-Est. Le médecin-chef du District sanitaire de Tenkodogo, Dr Pougyanga Sawadogo le confirme : « (…) ce centre vient répondre à un besoin de prise en charge des victimes et survivants des violences basées sur le genre. Il vient accroître le paquet d’offres de services à offrir au niveau de notre région ». Et visiblement, ce centre fait mieux en regroupant tout ce dont pourrait avoir besoin une personne victime de violence basée sur le genre.
Dans ce sens, à en croire Dr Sawadogo, que ce soit la prise en charge médicale, la prise en charge psychologique, la prise en charge juridique et la prise en charge judiciaire, tout est présent au centre, ce qui n’est pas le cas en général. C’est dire donc que ce centre répond à l’ensemble des besoins, en ayant en son sein un bloc administratif où tous les acteurs intervenant dans la chaîne de prise en charge y sont.
Une prise en charge complète des cas de violences basées sur le genre
L’attachée de santé en soins obstétricaux-gynécologiques Sabine Zemba est assise derrière son bureau. Elle est entourée de cartons de médicaments, de sacs contenant du savon, des dentifrices avec des brosses, des habits, des pagnes. Tout ce qu’il faut pour constituer ce qu’elle a appelé kit de dignité pour accueillir les femmes et jeunes fille victimes de VBG. L’attachée de santé est permanemment interrompue par la sonnerie de son téléphone. Dame Zemba assure que le centre de Tenkodogo est le seul centre au Burkina Faso pour le moment qui prend en charge les VBG de cette manière.
Entre deux coups de téléphone et des orientations à ses collègues, elle explique le circuit : « La première étape c’est l’accueil. Après l’accueil, la personne peut être dirigée vers mon bureau pour les besoins gynécologiques. Après, la personne ne ressort pas par la même porte, il y a une petite porte qui dirige la patiente vers l’Action sociale, l’appui juridique et la sécurité, donc tu n’as plus besoin d’aller ailleurs comme ça se fait dans les autres centres », explique l’attachée de santé en soins obstétricaux gynécologiques, avant d’ajouter que le centre ne prend pas que les femmes en charge, mais également des hommes.
En plus de cela, le centre dispose de dortoirs pour accueillir les victimes de VBG. « Quand tu es violenté et que tu arrives ici, que tu n’as pas où aller, on peut te garder ici jusqu’à ce qu’on trouve une solution. Avec l’Action sociale on trouve une famille où tu pourras continuer tes activités, pendant qu’on fait la médiation jusqu’à ce que tu repartes dans ta famille soit jusqu’à on te trouve une famille d’accueil », poursuit-elle.
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Au bout du compte, ce sont des femmes qui retrouvent la joie après leur passage dans ce centre. Témoin de ces faits, Henriette, Ouédraogo sage-femme au Centre Mère-enfants nous en fait la confidence. Elle-même contente du plateau technique sur place au centre, affirme que quand les femmes prises en charge rentrent chez elles et reviennent pour leurs rendez-vous, « souvent même tu ne les reconnais pas. Elles ont changé, elles sont joviales ».
Assèta Bangré, 24 ans, rencontrée au Centre Mère-enfants de Tenkodogo apprécie la qualité des services. «Ici c’est bien par rapport au village. La manière dont ils font les examens ici est différente du village», se rejouit-elle.
Boureima Dembélé