A Bittou, commune frontalière avec le Ghana, l’importation frauduleuse des pesticides non homologués est une plaie difficile à soigner. C’est un business juteux pour les commerçants qui ne payent pas de taxe, et pour les agriculteurs qui trouvent ces pesticides en provenance du Ghana moins chers. Les agents de santé sont pourtant formels sur la dangerosité de ces produits.
Bekouré, village situé à 8 km de Bittou dans la région du Centre-Est. Avant la tombée de la nuit, le jeune Ousséni Zampaligré s’apprête à pulvériser son champ de sésame. Le dispositif est bien en place, mais l’agriculteur de 26 ans n’a aucune protection sur lui. « Je dois porter des chaussures adaptées et des gants. Mais je n’ai pas de moyens», se justifie-t-il. Le pesticide qu’il va appliquer sur ses plants est importé du Ghana et non homologué au Burkina. Il se vend partout à Bittou.
A l’entrée du marché de bétail de Bittou, Inoussa Sawadogo 22 ans, propose différentes gammes de pesticides. Sa marchandise a la particularité d’être importée majoritairement du Ghana. « Les pesticides viennent du Ghana et du Burkina. La différence est que les produits ghanéens sont moins chers que les produits burkinabè », lance-t-il.
Un marché non encadré
Au marché central de Bittou, toute une section est entièrement dédiée à ce commerce frauduleux. Les allées ne désemplissent pas, les odeurs entremêlées des produits rendent l’air irrespirable pour les nouveaux visiteurs que nous sommes. Iliassou Kéré, la trentaine est tenancier d’une grande boutique de pesticides non homologués.
« Le produit ghanéen coûte 2000 F CFA et celui du Burkina, 3500 F CFA. Vous-même vous savez que les gens n’ont pas assez de moyen. Si tu pars chercher le produit du Burkina, les gens ne vont pas acheter. Comme nous sommes à la frontière, souvent, les ghanéens même font rentrer leurs produits qu’ils vendent aux gens alors que nous sommes là avec nos produits », explique le jeune commerçant.
Danger sur l’homme et la nature
Tous les pesticides sont dangereux, précise Joseph Ouédraogo, technicien d’l’agriculture à Bittou. Mais ceux non homologués le sont encore plus, insiste-t-il, tout en regrettant que ces produits inondent le marché local « C’est devenu un commerce pour tout le monde », ajoute le technicien.
Dominique Belemgnigré, responsable de la protection de la santé à Bittou est aussi formel. Ces pesticides présentent un grand risque sur la santé, même si les effets ne sont pas perceptibles dans l’immédiat. « A un moment donné ça peut déclencher certaines maladies comme le cancer et bien d’autres », met-il en garde. Pèle mêle, il ajoutera que ces produits ont un impact sur la fertilité de l’homme, provoquent des malformations sur les fœtus.
Le technicien d’agriculture Joseph Ouédraogo, lui, relève les risques liés à la préservation de l’environnement. « Ces produits sont vraiment dangereux. Les produits ghanéens sont généralement fabriqués par les populations, du coup, ils ne sont pas contrôlés et ont des répercussions sur la santé et l’environnement », note Joseph Ouédraogo.
Les jeunes agriculteurs comme Ousséni Zampaligré ; importateurs et vendeurs de pesticides non homologués comme Iliassou Kéré et Inoussa Sawadogo regrettent la non disponibilité des pesticides homologués pour tout type de traitement des plants au Burkina Faso.