Souriante, malgré tout. A 24 ans, Lucie Tiawara déjà mère de deux enfants, porte une troisième grossesse. Pratiquement à terme, son quotidien n’est pas de tout repos à Dédougou dans la région de la boucle du Mouhoun. La jeune dame, avec ses camarades, passe de champ en champ pour cultiver et avoir de quoi préparer la venue de son 3e enfant.
Une sueur s’écrase sur sa joue. Elle l’essuie de son pagne, avant de se remettre à la tâche avec sa daba. Le soleil n’est pas encore au zénith, le temps est plutôt clément en cette matinée du 30 juillet, mais Lucie Tiawara 24 ans accuse visiblement déjà le coup de la fatigue. La journée est pourtant encore longue.
Avec ses camarades, elle cultive un champ d’arachide moyennant une petite rétribution en fin de journée. « Souvent on veut s’acheter des choses, mais on n’a rien comme argent. C’est la raison pour laquelle on fait ça pour avoir quelque chose à la fin de la journée. C’est ainsi qu’on arrive à assurer certaines dépenses », explique la jeune travailleuse.
Se remettre à Dieu
Une dizaine d’ouvriers agricoles labourent la terre, en parfaite synchronisation. L’ambiance est bonne, on rit souvent aux éclats comme pour faire oublier la dureté de la tâche. Lucie Tiawara se démarque par son allure et sa façon de se pencher sur son outil de travail. Enceinte et pratiquement à terme, on la voit se contorsionner avec précaution pour travailler. Elle l’admet, sa situation n’est pas facile.
« Ça fait vraiment mal, mais je n’ai pas le choix. Même les médecins, lorsque je vais pour la pesée, me disent de ne pas me courber pendant longtemps », reconnait-elle. « Mais est-ce qu’ils vont m’apporter à manger ? Bien que je sois enceinte, si je m’assois qui viendra me soutenir. Au moins en travaillant dans les champs, je peux être sûre d’avoir quelques sous », lance-t-elle laconiquement, avant de se remettre à la providence pour la suite de sa grossesse. « On travaille et on se contente de prier Dieu pour que tout se passe bien ».
Un travail pénible pour des broutilles
Depuis deux ans, travailler comme ouvrière agricole est le gagne-pain de la jeune mère. « Nous sommes payés à 1000 CFA par jour », précise Samahé Coulibaly, une autre jeune dame du groupe de travail. Un travail pénible pour des broutilles, maugrée Lucie. « Tu vas rester courber du matin au soir. Le soir ton dos te fait très mal, tu dois payer du savon pour laver tes habits, acheter du bois pour chauffer de l’eau et te doucher. En plus de tout cela, tu dois te nourrir », explique la femme enceinte qui note que son mari « se débrouille » dans la vie.
Pour rentrer chaque soir avec un revenu plus ou moins consistant, le groupe de travail a convenu d’une solution : remettre de façon tournante, l’ensemble des gains de la journée à une personne. A quelques mois de son accouchement, Lucie ne pense-t-elle pas à arrêter ce travail que lui ont déconseillé les médecins ? Elle répond par un sourire, avant de préciser que si une autre opportunité se présente, elle la saisira.
« En réalité je sais que ce n’est pas un travail à faire pendant longtemps, parce que ça fatigue, ça vieillit et ça diminue l’espérance de vie », dit-elle.