La voir sur les plateaux est un pur délice pour les amoureux du théâtre. Du talent, de la passion et de l’amour à profusion. Safoura Kaboré pour certains observateurs avertis du domaine, est l’une des meilleures actrices du Burkina et même du continent. Portrait.

Écriture et représentation. Ainsi pourrait-on résumer une partie de la vie de  Safoura Kaboré. La comédienne ne peut se définir en dehors du 6^e art qui selon elle, est le meilleur endroit où  «la société se questionne, se réinvente et anticipe sur le futur ». 19 ans d’expérience et un amour qui continue de se bonifier pour les planches.

Quand en 2004 elle se lance dans le grand bain avec la pièce ‘’La tribu de la gloire’’, Safoura n’imaginait certainement pas que sa carrière serait aussi riche et l’enverrait sur les scènes d’Afrique et d’ailleurs.

Mais elle a pris le temps d’apprendre, d’aller à la bonne école avec le théâtre de la fraternité de Jean-Pierre Guingané. C’est là véritablement qu’elle fait ses armes. Elle y passera 3 ans. Après les pièces dans lesquelles elle fait montre de son talent s’égrènent. ‘’La tribu de la gloire’’, “Antigone”, “Sindi”, “Pylad”, Baabou Roi, ‘’Façon d’aimer’’, ‘’Et que mon règne arrive’’, ‘’Sali’’…

Lire aussi: « C’est choquant d’entendre que le théâtre se meurt au Burkina »

Plusieurs théâtres ont vu passer l’ancienne élève de Jean-Pierre Guingané. Entre autres le CITO (Carrefour international du théâtre de Ouagadougou); la compagnie « Fereen », la compagnie « les emprunts »; la compagnie « Acclamations » et les recréatrales. Elle a également joué dans d’autres structures internationales telles que le théâtre national belge, le théâtre océan nord, le théâtre national populaire de Lyon, le Festival Trance Amérique (FTA) et dans des pays comme le Mali, la Guinée.

Chaque pièce est particulière, une histoire singulière. « Les projets sont différents et chaque rôle incarné est un nouveau défi et une expérience unique pour moi car il faut arriver à s’oublier pour vivre pleinement le personnage à incarner et ce n’est jamais évident de s’effacer pour prendre la peau, la mémoire, les histoires, les pensées d’une autre personne », image-t-elle.

Safoura, une ‘’bête de scène’’

Son inspiration, son engagement, son dévouement et son jeu d’actrice sont appréciés par ses collaborateurs et son entourage. C’est le cas de la metteuse en scène Odile Sankara, président des ‘’Récréatrales’’ qui confie que Safoura est la relève des comédiennes du Burkina. « Elle est pour moi une bête du plateau. Elle a une parfaite maîtrise de la langue au théâtre. Je l’appelle la boîte à idées, car elle me fait de belles propositions et je peux dire qu’à plus de 50% les idées dans mes créations sont venues d’elle. Je lui fais toujours appel pour mes créations car elle est très dynamique et est un moteur de motivation pour l’équipe toute entière », précise la sœur cadette du Président Thomas Sankara.

Passionnée, intelligente, engagée et gracieuse tels sont les mots de Aristide Tarnagda, lauréat 2017 du grand prix littéraire d’Afrique noire, pour décrire la jeune comédienne. Safoura, à l’entendre, fait partie de ces comédiennes qui exaltent le metteur en scène en mettant en lumière les mots et les idées de ce dernier. «Safoura est dans presque toutes mes créations parce qu’elle est le point de départ de beaucoup de mes textes. Elle fait partie de ces comédiennes qui sont gracieuses sur scène, qui remplissent la scène, qui vous obligent en tant que metteur en scène et en tant qu’auteur à vous dépasser, et à produire quelque chose de qualitatif », dit-il, tout admiratif.

Lire aussi: Roukiata Ouédraogo : parcours d’une comédienne  »rebelle »

Il poursuit en ajoutant que le don de soi de Safoura et sa passion dans le travail bien fait font d’elle, une des grandes comédiennes du Burkina et même du continent.

Quand il y a une représentation théâtrale dans laquelle Safoura joue, Merveille Bayala fait tout pour ne pas rater.  «Je l’ai connue lorsqu’elle a joué dans ‘’façon d’aimer’’. Elle est parvenue à travers son jeu d’acteur à me faire voyager. Elle est pétrie de talent. Je souhaite que les jeunes comédiennes s’inspirent d’elle pour que le monde du théâtre burkinabè garde sa magie», note l’amatrice du 6^e art.

Des moments inoubliables  

La jeune artiste se souvient encore de ses meilleurs moments vécus dans les rues des Récreatrales au quartier Gounghin de Ouagadougou. A l’entendre, voir le public prendre d’assaut les cours familiales et les guichets fermés tous les soirs durant les Récreatrales en 2014 ont été des instants mémorables.

Toutes les représentations sont des moments de bonheur, mais certaines restent en permanence dans un coin de la tête de la comédienne : « Façon d’aimer » de Aristide Tarnagda. « Cette pièce est allée me chercher dans un endroit où j’étais en tant que femme. Elle traite de la situation de la femme, et de toutes ces choses qui sont des non-dits pour les femmes dans nos sociétés», relate-t-elle en ajoutant que le texte de Eleora Miano mis en scène par Odile Sankara ‘’Et que mon règne arrive’’ l’a aussi transportée parce qu’il questionne le rapport de la femme avec le monde.

Les difficultés pour le financement de ses projets de spectacles sont le petit point noir qui chagrine Safoura Kaboré. Mais en attendant des lendemains meilleurs, elle continue de vivre pleinement sa passion et de transmettre le virus du théâtre aux jeunes.

StudioYafa avec MoussoNews