Au Burkina Faso, obtenir un permis de conduire relève d’un parcours de combattant. Le secteur est miné par la corruption. Des jeunes sont souvent obligés de soudoyer des moniteurs et des examinateurs pour arracher le précieux sésame.
Jour d’épreuve de conduite à Kalgondin, un quartier de Ouagadougou. Dans un grand espace clôturé avec des pans de murs tombés, plusieurs camions auto-école en fil indienne bien définis, des jeunes hommes et femme, sont au volant sous la supervision de moniteurs de conduite. Les bruits de klaxons et les vrombissements des véhicules et de motos noient souvent la voix des moniteurs qui font descendre et monter des jeunes apprenants.
Parmi eux, Jules Bado. Le visage triste il vient de rater son test. « J’ai démarré la voiture, au moment de braquer, y’avait un camion-citerne qui venait, on m’a dit de freiner, j’ai paniqué sans appuyer sur l’embrayage, c’est ça qui m’a fait échouer », dit-il la voix enrouillée. Au Burkina Faso, passer le permis de conduire est une épreuve redouté. La qualité des véhicules mis à la disposition des apprenants ne permet pas souvent de réussir son examen.
Soudoyer les moniteurs
« On vous met de vieux véhicules, vous démarrez, le véhicule s’éteint on vous dit descendez. Souvent, pendant l’apprentissage de la conduite vous n’avez pas assez de temps. En définitive la conséquence c’est quoi ? Beaucoup préfèrent donner de l’argent pour pouvoir avoir le permis. C’est un danger », regrette Moussa Traoré, un apprenant.
Ecouter aussi: Sécurité routière, même à mobylette, il faut un permis de conduire
Selon ces apprenants, les moniteurs exigent de l’argent pour faire passer et réussir aux différents tests. Sylvain Bassolé étudiant à l’Université Joseph Ki-Zerbo dit avoir été approché par des moniteurs. Ces derniers lui ont promis de raccourcir son temps de formation moyennant de l’argent. « J’aurai pu ne pas prendre tout ce temps si j’avais payé à chaque examen 25 mille francs. En tant qu’étudiant, je ne pouvais pas me le permettre », se plaint Bassolé.
Le permis, un précieux sésame
Ibrahim Nyamba, moniteur dans une auto-école de la place déplore, en effet, l’escroquerie de certains moniteurs. « L’apprenant peut avoir été formé correctement. Il a réussi son test mais le moniteur prend l’argent en disant qu’il a traité. S’il se trouve que je suis comme ces moniteurs, je prends l’argent. S’il gagne, c’est comme si j’ai intervenu alors que je n’ai rien donné à un moniteur ».
Et pourtant, certains jeunes se croient obligés de soudoyer les moniteurs et examinateurs du fait de l’urgence. Avoir le permis de conduire ouvre plusieurs portes comme celui de l’emploi. « Je suis allé pour un stage et je me suis rendu compte que pour la composition du dossier, le permis de conduire faisait partie des pièces à joindre », justifie Alima Ouédraogo en fin d’étude.
Donc, c’est ce qui m’a motivé à m’inscrire. En attendant de mieux assainir le milieu et lutter contre la corruption, des apprenants appellent les entreprises d’auto-écoles et les autorités compétentes à mettre en place des infrastructures adaptées pour la formation des apprentis. Depuis septembre 2019, le permis de conduire au Burkina Faso n’est plus échangeable avec celui de la France selon une décision du ministre français de l’Europe et des affaires étrangères.