Thomas Sankara : apaisement après le verdict du procès©Sia KAMBOU / AFP
Le verdict du procès est un soulagement pour certains Burkinabè

Thomas Sankara : apaisement après le verdict du procès

La date du mercredi 6 avril 2022 restera mémorable pour les partisans du président Thomas Sankara et ses accompagnons assassinés il y a 35 ans. Le tribunal a condamné Blaise Compaoré, Gilbert Diendéré et Hyacinthe Kafando, les principaux accusés à la prison à vie à la suite d’un procès de son assassinat et ceux de 12 autres de ses compagnons. Le procès a duré six mois.

A l’annonce du verdict, la salle de conférence du quartier de Ouaga 2000 s’est surchauffé. Pendant que les partisans du président Thomas Sankara criaient leur victoire, certains criaient plutôt « Libérez Diendéré !». Les esprits ont continué à s’échauffer jusqu’à l’extérieur du palais.

Habillée de son habituel tenue en Faso danfani dont son mari a fait la promotion, Mariam Sankara, l’épouse de l’ancien président du Faso, visiblement satisfaite s’est réjoui de ce verdict : « Nous avons demandé la justice, la vérité, et le procès a permis de confirmer beaucoup de choses qui étaient dites. Le verdict est tombé, le juge a fait ce qu’il pouvait. Notre but était aussi que ces violences politiques finissent. Je pense que ce verdict va donner à réfléchir à beaucoup de personnes ». Mariam Sankara s’était exilé après l’assassinat de son mari avant de revenir à la faveur de l’insurrection populaire de 2014. Blaise Compaoré avait chassé du pouvoir.

L’apaisement

Le président Thomas Sankara a été assassiné le 15 octobre 1987 avec 12 autres de ses compagnons. L’un d’entre eux, Alouna Traoré a échappé à la mort ce jour-là. Il a tenu à entendre de ses propres oreilles, le verdict de ce procès. « Je suis apaisé parce que les faits sont établis. Ils ont abusés de nous dans toute notre sincérité, notre bonne foi. Nous aimons ce pays et nous avons rêvé ce pays. Je suis content parce que 35 ans après la vague et l’imagination Thomas continue de faire bouger les lignes en Afrique », a affirmé Alouna Traoré. Pour lui toujours, « le rêve n’a pas été assassiné. La vérité a été établie».

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Artiste Chanteur, Souleymane Ouédraogo dit Basic Soul, acteur de la société civile a rendu hommage dans une chanson à Thomas Sankara. Le plus important, de son point de vue, c’est la réparation des familles des victimes du 15 octobre 1987. « On espère que les familles des victimes vont être restaurées dans leur honneur et qu’elles pourront finalement faire le deuil. C’est une étape aussi pour la réparation visible et dans ce cadre que les différentes victimes puissent bénéficier d’une sépulture digne », espère Souleymane Ouédraogo.

Faire le deuil pour les victimes

Par contre, Mousbila Sankara, oncle de Thomas Sankara ambassadeur du Burkina Faso en Libye pendant le régime de Thomas Sankara satisfait du verdict mais espérait mieux du procès : « Toute la vérité n’a pas été dit parce que tout le monde n’était pas présent. Il a manqué Hyacinthe et Blaise et ces deux-là détiennent une bonne partie de la vérité ».

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Des acteurs de la société civile voient en ce procès une première étape vers une réconciliation nationale. Souleymane Ouédraogo n’est pas de cet avis : « C’est un élément important parce que les victimes de cette période vont pouvoir enfin faire leur deuil et pouvoir pardonner. C’est une étape qui sera prise en compte mais je ne crois pas que ce soir nécessaire et suffisant pour enclencher la réconciliation du peuple burkinabè parce qu’après le 15 octobre 1987, il y a eu malheureusement beaucoup de faits qui sont intervenus et qui a déchiré le peuple burkinabè y compris le dernier coup d’Etat (ndlr. Coup Etat Roch Kaboré, par l’armée nationale) ».

L’absence de Blaise Compaoré

D’ailleurs, à la sortie du procès, un groupe de jeunes protestaient avec rage contre le verdict. « Je ne suis pas content de ce jugement. Il fallait tout simplement venir faire Diendéré, faire le jugement pour faire plaisir à un camp (…) Il fallait venir les autres (Blaise Compaoré et Gilbert Diendéré qui purge une peine de 20 ans de prison suite au Coup d’Etat manqué en septembre 2015)», estime Hermann Tapsoba. Blaise Compaoré et Hyacinthe Kafando, tous réfugiés en Côte d’Ivoire étaient absents au cours de ce procès. L’avocat de Gilbert Diendéré Mathieu Somé a jugé la peine « excessive» estimant que son client est venu donner sa version contrairement aux deux autres.

En plus des principaux accusés,  le tribunal a retenu cinq ans de prisons avec sursis pour Belemlilga Albert Sibidi et Deme Diakalia, trois ans fermes pour Tondé Ninda Pascal alias Manganaaba. Tibo Ouédraogo et Jean Pierre Palm écope de dix ans de prisons fermes. 11 ans fermes pour Élysée Yamba Ilboudo (11 ans), Idrissa Sawadogo Ouédraogo Nanonswindé (20 ans). Deux accusés Bossobé Traoré, Hamado Kafando, Alidou Diébré ont été acquittés. Le procès de l’assassinat de Thomas Sankara s’était ouvert en octobre 2020. Il avait été perturbé par le Coup d’Etat militaire du 24 janvier 2021.

Boukari OUEDRAOGO