Le 15 janvier 2024, le Burkina Faso, le Mali et le Niger, regroupés au sein de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) ont annoncé leur intention de se retirer de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Ils ont évoqué des raisons de souveraineté, de sécurité et de développement. En Côte d’Ivoire, cette décision suscite de la méfiance de la part de la population dont une grande partie est ressortissante des trois pays concernés.
Dans un kiosque à café du quartier 14 de Korhogo, un groupe d’hommes discutent de football en particulier de la CAN 2023 qui se tient en Côte d’Ivoire. C’est la veille du match entre le Mali et le Burkina Faso comptant pour les huitièmes de finale. C’est aussi le sujet principal de discussions dans les regroupements dans la cité du Poro qui abrite une forte communauté burkinabè et malienne.
Lorsque nous lançons le débat sur le retrait du Burkina Faso, du Mali et du Niger de la CEDEAO, une organisation regroupant 15 pays d’Afrique de l’Ouest, c’est un silence d’abord. Le propriétaire du kiosque, un Burkinabè s’éloigne pour fuir le débat. Katié Yéo, un Ivoirien se lance quand même.
Pas de problème entre communautés
« Pour moi, l’Afrique c’est l’Afrique! Je ne suis pas trop dans la politique. Peut-être que c’est une raison pour eux de définir leur politique. En Côte d’Ivoire ici avec les Burkinabè, on n’a pas de problème », répond-il avant de lancer un regard vers Salifou Yéo comme pour demander de l’aide. « Cette question revient aux dirigeants. Je pense qu’ils vont trouver une solution par la diplomatie. Nous citoyens, nous ne devons pas trop nous exprimer sur cela », dit-il à son tour en balbutiant. Cette réponse permet à Katié de renchérir : « C’est un sujet de diplomatie alors que nous entre populations, nous n’avons pas de problème ».
Pour convaincre, Salifou rappelle que beaucoup d’Ivoiriens sont nés et ont grandi avec des Burkinabè comme amis. Ce qui l’amène à dire que ces amitiés sont plus fortes que les sujets politiques qui divisent parfois.
Souleymane Zongo vit en Côte d’Ivoire depuis plusieurs années. Le jeune homme assure n’avoir jamais de problème de cohabitation avec les Ivoiriens malgré certaines tensions politiques qui peuvent exister. Par exemple, en Côte d’Ivoire, les ressortissants hors CEDEAO doivent se munir d’une carte de séjour estimée à 300 000 francs CFA. Une fortune pour beaucoup d’étrangers, la plupart de classe moyenne.
Le foot, plutôt que la politique
Mais, cela n’inquiète pas Souleymane Zongo, un Burkinabè vivant en Côte d’Ivoire depuis plusieurs années. Il est convaincu que les acteurs politiques trouveront une solution à cette annonce. Il n’est pas inquiet. « Il peut y avoir des problèmes comme la carte de séjour. Il y a d’ailleurs eu la carte de séjour en 1993 mais cela n’empêche pas les Burkinabè de vivre en Côte d’Ivoire », souligne-t-il.
Mais, ces hommes qui se connaissent depuis plusieurs années préfèrent plutôt parler de football que de s’appesantir sur ce sujet qui pourrait diviser. C’est pourquoi, ils décident de changer rapidement de sujets.
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Malgré cette décision, il estime que les Nigériens n’auront aucun problème avec les Ivoiriens. « Je vis en Côte d’Ivoire depuis 1986. Ce que je sais de la Côte d’Ivoire, je ne sais pas cela du Niger (…) C’est comme la langue et les dents. Ils finiront par se réconcilier », analyse Rabani Idé.
Mais, à Korhogo, l’on préfère se concentrer sur la CAN 2023 plutôt que de discuter de sujets politiques et surtout de ceux qui pourraient créer la division.
Boukari Ouédraogo
envoyé spécial à Korhogo