Ce n’est pas un secret. Les changements climatiques touchent le Burkina Faso. Ces changements climatiques ont des conséquences désastreuses sur le plan agricole ou sur la santé. Le climatologue à l’Agence nationale de la météorologie (ANAM) Jacques Ulrich Diasso revient sur les dispositions à prendre pour réduire les effets de ces changements climatiques.
On assiste de plus en plus à un décalage des saisons au Burkina Faso et aussi une très forte chaleur ces temps-ci. Est-ce qu’aujourd’hui, on peut parler de dérèglement climatique ?
Oui. Je l’affirme parce qu’une des caractéristiques du changement climatique, c’est la hausse des températures. Ça a été l’une des premières alertes qui a permis aux scientifiques de tirer sur la sonnette d’alarme et d’attirer l’attention des décideurs sur les mesures à prendre pour limiter cela. Vous allez constater également qu’il y a une croissance des inondations.
Qu’est-ce qui pourrait bien expliquer ce dérèglement climatique?
De façon mondiale, le secteur des transports a été pendant longtemps le premier secteur le plus pollueur de l’environnement, mais aujourd’hui, il y a le secteur de l’énergie qui est en train de prendre de l’ampleur. Au Burkina Faso, plusieurs facteurs peuvent expliquer le changement climatique. Il y a entre autre les jets des sachets plastiques au sol, le dioxyde de carbone, les fumés que dégagent les engins et les véhicules en circulation ainsi que les centrales de production d’énergie qui dégagent également de la fumée qui polluent l’environnement. Une autre cause qu’il faut souligner est l’utilisation des pesticides dans l’agriculture et la pollution de l’environnement.
Quelles peuvent être les conséquences de ce dérèglement climatique au Burkina Faso ?
Les conséquences sont nombreuses et se situent à plusieurs niveaux. Avec l’évolution du climat, on assiste de plus en plus à des inondations et en même temps, on note la présence massive des poches de sécheresse. Du coup, cela affecte le secteur de l’agriculture parce que nous avons des moyens d’adaptation qui sont extrêmement vulnérables aux changements climatiques. Ce que nos braves paysans sont en train de faire peut être facilement anéanti par une sécheresse de 20 ou 30 jours. Ce qui veut dire l’une des premières conséquences sur l’agriculture est la mauvaise productivité liée soit à un début tardif ou une fin précoce des pluies. La mauvaise productivité va entrainer la rareté des vivres et leurs hausses sur le marché donc en général, il se crée une insécurité alimentaire.
Quand on prend le secteur des ressources en eaux et en énergie, pour le cas de l’eau, la température entraine l’augmentation de l’évaporation de l’eau qui retourne dans l’atmosphère. Cela créé une diminution des eaux des barrages. Cette diminution des eaux va affecter, en même temps, le secteur de l’énergie parce que si la température augmente, vous avez forcément besoin de plus d’énergie. Malheureusement les barrages hydro-électriques n’arriveront plus à supporter une longue attente des pluies. Donc, nous serons obligés d’être à court d’énergie ou d’en importer d’ailleurs.
Dans le secteur de la santé, des vagues de chaleur ont une conséquence énorme sur la santé et on les appelle le « tueur silencieux ». Il ne se manifeste pas visiblement sur l’homme par exemple si les hypertendus, ça peut entrainer la mort, mais on ne s’en rend pas compte. On a également l’augmentation des maladies climato-sensibles comme le paludisme lié aux cas d’inondation. Enfin, il y a le cas des malnutritions lié au fait que les conséquences sur l’agriculture ont entrainé une indisponibilité des denrées alimentaires. Donc, une franche partie de la population devient vulnérable à l’insécurité alimentaire.
Quelles sont les actions menées ici au Burkina Faso pour freiner les effets du changement climatique ?
L’Etat burkinabè a élaboré un document dans lequel il est définit des stratégies et actions pour contribuer à réduire les effets du changement climatique dans 20, 30 ans. Déjà, les recommandations formulées à l’endroit des agriculteurs vont permettre de réduire les risques liés aux changements climatiques. Dans le même sens, l’Etat à travers l’Agence nationale de la météorologie, mais également à travers le CONASUR travaillent à pourvoir prévenir les risques afin de donner l’alerte aux populations sur les inondations. L’ANAM travaille également au développement des produits ciblés dans l’agriculture, la sécurité alimentaire, les eaux, la réduction des risques et des catastrophes et les énergies. L’Etat fournit également des efforts dans la promotion des énergies renouvelables qui est également un bon moyen pour réduire les effets du phénomène.
Quelle est la part de responsabilité des populations dans l’atténuation des effets des changements climatiques au Burkina Faso ?
Les populations ont également une part de responsabilité dans la lutte contre le changement climatique. Il faut surtout éviter de jeter les sachets plastiques par terre, la coupe abusive du bois, arrêter l’utilisation des pesticides dans l’agriculture. Pour terminer, il faut économiser l’énergie quand le besoin n’est pas nécessaire parce que, les climatiseurs, par exemple, dégagent du gaz qui affecte l’environnement. Plus ils sont en marche, plus le risque est élevé.
Interview réalisée par Faishal OUEDRAOGO