Au Burkina Faso l’onde de choc de la flambée des prix des céréales se fait sentir jusque dans les poulaillers avec l’augmentation des aliments pour la volaille. Difficile de tenir le coup face à cette nouvelle donne. Des jeunes éleveurs comme Siriki Aboubacar Naon tente de trouver des palliatifs. Dans sa petite ferme à Koudougou, il s’est lancé dans la production d’asticots pour amortir le choc.
Les mains gantées, vêtu d’un pantalon jeans et d’un tee-shirt sur lequel on peut lire « poulet du Faso », Siriki Aboubacar Naon avec cet accoutrement n’est sûrement pas en train de tracer une carte. Diplômé d’un master en cartographie, il est depuis 2016 un fermier. Dans une vaste cour au secteur 9 de Koudougou, le jeune s’affaire à nourrir ses poulets locaux, plus d’une centaine de têtes.
Mais l’aliment avec lequel Aboubacar nourrit sa volaille est bien particulier. Ce soir-là, il utilise des asticots nouvellement récoltés. « Pour produire les asticots il faut disposer du son de soja, d’un bidon ou d’une bassine ou vous allez mettre les résidus et vous créer les conditions pour attirer les mouches vers ce résidu. D’autres utilisent du poisson, de la viande nous on prend souvent du sang coagulé. On fait un mélange, deux jours à trois jours après, on récolte les asticots. S’ils sont dans des bonnes conditions seulement ça va produire. S’il fait trop chaud ça ne va pas produire s’il n’y a pas d’humidité aussi, ce n’est pas évident », explique le jeune fermier.
Lire aussi : Grippe aviaire au Burkina : « On risque de perdre le poulet bicyclette, notre espèce locale »
Dans l’espace délimité où se trouvent sa volaille, il passe d’un compartiment à un autre pour expliquer le processus de production des asticots. Aucun détail n’est omis par le propriétaire des lieux, accompagné d’un jeune ami.
La volaille de Aboubacar n’a pas toujours été nourrie aux asticots. C’est seulement depuis février qu’il expérimente cet aliment. La raison est toute simple : le renchérissement des aliments. Il fallait donc s’adapter ou arrêter carrément l’élevage de la volaille. Pour ce jeune qui après les études universitaires a pris goût à l’entreprenariat, il n’était pas question de baisser les bras.
« Si on arrive à couvrir notre charge alimentaire de 20% c’est déjà bon. Sur 100 kilogrammes si le kilogramme te fait 350f on voit ce que ça donne déjà ce n’est pas moins de 7500f que tu économises. C’est ce qui nous a amené dans la production des asticots », poursuit-il avant d’ajouter que dans ce contexte il faut minimiser les dépenses, faire des économies.
Lire aussi: Grippe aviaire au Burkina : « tous les poulets n’ont pas la maladie »
Selon le tenancier de la ferme, en plus de faire des économies, les asticots qui sont riches en protéine, accélèrent la croissance des poulets. « Quand on nourrit les poulets aux asticots on se rend compte qu’à partir de 75 jours, ils sont consommables. Moi mes poulets je les ai mis le 14 février 2022, nourrit 20% aux asticots au plus tard le 25 avril 2022 j’ai commencé à les commercialiser », dit-il, l’air satisfait.
Pour l’instant, les asticots représentent juste 20 % de la charge alimentaire de la ferme. Mais son propriétaire se dit déjà satisfait. Pousser plus loin en produisant plus, c’est le vœu de Aboubacar. Il reconnaît certes que le processus n’est pas facile, mais le jeu en vaut la chandelle si son portefeuille peut souffler, si le poids de sa volaille peut vite augmenter en peu de temps, et surtout s’il peut minimiser les risques de maladies (le processus et les conditions de fabrication des aliments achetés ne sont pas maitrisés et peuvent être source de maladie pour la volaille).
Tiga Cheick Sawadogo