Entre trouble à l’ordre public et atteinte aux bonnes mœurs, les chambres de passe ne sont pas vues d’un bon œil. La cohabitation avec les riverains dans certains quartiers s’avère très difficile. A Dapoya, un quartier de la capitale, les parents s’inquiètent de l’influence des prostituées et la présence des maisons closes sur l’éducation de leurs enfants.
Maison close, chambre de passe (CDP), maison de tolérance, chambre noire…autant d’expressions pour désigner ces lieux où certains individus se retrouvent pour « passer du bon temps ». Cette activité lucrative, attire du beau monde tous les soirs à Dapoya, un quartier situé en plein centre-ville de Ouagadougou et abrite des concessions d’un autre genre.
En pleine cuisine sous un soleil ardent, Mme Diawara, louche à la main, habillée d’une robe de couleur jaune décrit le calvaire du voisinage. « À partir de 19h, tu ne peux même pas sortir devant ta porte. Tu sors, quelqu’un vient t’aborder », déclare notre interlocutrice avec une grande déception. « Une situation plus que décevante, c’est surtout la fréquentation des enfants de 13-14 ans dans ces lieux de prostitution et de débauche », renchérit-elle.
Elle poursuit avec un ton exprimant son ras-le-bol : « La nuit tu ne peux pas dormir. Ils discutent des prix derrière ta fenêtre. Même leur façon de mâcher le chewing-gum t’empêche de fermer l’œil », soupire-t-elle d’un air désespéré.
Des déménagements forcés
Selon Mme Diawara dont la cour est voisine à plusieurs chambres de passe, cette situation a causé le déménagement de certaines personnes qui y vivaient auparavant. Malgré ces désagréments, elle dit n’avoir pas le choix car elle et sa famille sont obligées de rester par manque de moyens.
Autre phénomène notable, la présence de ces chambres de passe dans le quartier, attire des voleurs. Mme Diawara, nous explique vivre un véritable enfer. Elle témoigne que son mari a été agressé plusieurs fois. « Ou y’a prostituée y’a bandit », a-t-elle conclu.
Une chambre de passe est une maison de rencontre pour des relations adultérines, ou encore une maison où travaillent les prostituées.
L’éducation des enfants menacée
Pour certains vieux du quartier, ce phénomène est une cause de mauvaise éducation et de dépravation des bonnes mœurs. Pour Kassoum Sana, un riverain que nous avons croisé à l’entrée d’une mosquée, il n’y a rien à dire. La présence des filles de joie (prostituées ou travailleuses du sexe) a un impact négatif sur leurs enfants. Notamment, certaines filles du quartier imitent ou essaient d’imiter ces ‘’commerçantes du sexe’’.
Pis, il regrette que ce commerce se transporte devant les écoles du quartier où les filles s’arrêtent pour héler d’éventuels clients. Ousmane Giuré, un autre habitant du quartier, trouve difficile de bien éduquer son enfant dans cet environnement. « Pour un enfant dont sa cour et son école sont encadrés par des chambres de passe, pour réussir son éducation, il faut te lever de bonne heure », constate avec déception notre interlocuteur.
Une réputation ternie
Selon certaines filles de Dapoya, la présence des prostituées dans le quartier ne les honore pas. « Quand une jeune fille dit qu’elle vient de ce quartier, elle n’est plus respectée, on trouve qu’elle n’est pas sérieuse », clame Ariane Traoré une élève. Pour cette jeune fille, les hommes qui leur font la cour, n’ont pas confiance en elles. Certains doutent si elles ne font pas partie de ces prostituées.
De nombreux résidents expriment leur ras-le-bol face à cette situation. Pour eux, les maisons closes pullulent dans leurs rues. Vivre dans ces conditions, c’est vivre dans la dépravation. L’ampleur du phénomène a nécessité l’intervention des forces de l’ordre en 2014. Elles ont patrouillé quelques jours, embarqué des prostituées. Après, plus rien. La pratique est repartie de plus belle.
Les habitants proposent que les autorités sévissent contre le phénomène. Elles doivent prendre des mesures coercitives contre les filles qui s’adonnent à cette activité en les obligeant à déguerpir loin des quartiers d’habitation.
Salamatou Dicko (Stagiaire)