Les tresses africaines sont de plus en plus pratiquées sur les petites filles, souvent de moins d’un an. Des salons de coiffures spécialement dédiés aux enfants ont ainsi vu le jour dans les grandes villes. Chaque coiffeuse use de sa stratégie pour tresser sa jeune clientèle qui pleure sous le coup de la douleur. Une occasion pour les pédiatres d’alerter certains parents, pressés de voir leur fille coquette, au risque d’endommager la santé de son cuir chevelu.
Assise dans une grande cour vide, sur un long banc, peigne à la main, Sanou Korotimi, la trentaine est en pleine tresse d’une fillette de 4 ans. Affectueusement appelée bôbô mousso, elle place la tête de la petite fille entre ses cuisses pour l’immobiliser. Elle est dans ce métier depuis l’âge de 12 ans. Un métier qu’elle a d’ailleurs appris auprès de sa défunte mère.
Contrairement aux adultes, bôbô mousso reconnaît que c’est un exercice difficile que de tresser les enfants. « Avec certains enfants, tu peux commencer à 8h pour finir à 10h ou 11h. Il y a des enfants qui n’acceptent pas, donc il faut avoir le cœur froid pour pouvoir la tresser. Souvent même on pose une chicote à cote pour faire peur à l’enfant », explique la coiffeuse.
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Florence Tocan elle, tresse au marché de Wemtenga, un quartier de Ouagadougou. Il y a plus de 10 ans qu’elle exerce cette activité avec comme clientèle, les toutes petites. Assise sur une chaise, sous son hangar, elle tresse une petite fille de 4ans qui semble ne pas avoir mal.
« J’adore les enfants donc je sais comment m’y prendre avec eux. J’arrive à les flatter, je chante pour elles, je joue avec elles. C’est un peu difficile mais j’arrive à m’en sortir. Souvent pour faciliter le travail, il faut avoir les techniques. Lorsque je vois un enfant mal coiffé j’ai mal, moi j’aime quand l’enfant est bien tressée », précise-t-elle.
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En plus des techniques qu’elles mettent en œuvre pour tresser leurs très jeunes clientes, certaines coiffeuses ont besoin de la présence des mères des enfants. Ces dernières aident à calmer leurs enfants qui pleurent en se plaignant parfois de douleur. C’est le cas de Mariam, restauratrice et mère de 2 filles dont 3 ans et 5 ans. Comme pour expliquer pourquoi elle se donne tant de peine pour faire coiffer sa fille, elle estime qu’il faut souffrir pour être belle. Du coup, elle reste toujours à côté pour leur offrir des amuses bouches.
« J’aime quand mes filles sont bien coiffées, lorsque la coiffeuse les tresse, je m’assoie pour les flatter avec des bonbons, des biscuits afin de faciliter le travail. Celle de 5 ans est déjà habituée aux tresses mais sa petite sœur de 3 n’est pas encore habituée donc elle pleure » affirme-t-elle en éclatant de rire.
Gare aux inconvénients
C’est bien de voir son enfant toute belle avec des tresses, mais préviennent des pédiatres dans certains cas, cela peut avoir des conséquences. Selon le pédiatre Nicaise Zagré, c’est après 18 mois qu’il faut penser à tresser son enfant. Le faire avant peut comporter des risques.
« Le cuir chevelu de l’enfant est fragile donc cela peut provoquer des maladies. Vous agressez les cheveux de l’enfant donc ça peut ne pas bien pousser après. Et quand vous prenez au niveau cérébral vous allez voir que les enfants ne peuvent pas bien s’asseoir, ils vont pleurer car les tresses que vous faites ne sont pas adaptées. On coince la tête pour tresser, l’enfant peut s’étouffer, le cerveau prend un coup donc ça peut traumatiser l’enfant et entraîner un retard » , insiste le pédiatre.
Les pédiatres conseillent alors de ne pas serrer les cheveux quand on décide de tresser son enfant.
Safiatou Zong-Naba (Collaboratrice)