Après de bons et loyaux services à la Nation, les travailleurs admis à la retraite bénéficient d’une visite médicale annuelle gratuite. Toutefois, ceux-ci grincent des dents quant à l’efficacité de cette visite. A en croire certains il ne sert à rien de diagnostiquer un mal et ne pas leur donner les moyens de le soigner.
Lorsque les travailleurs partent à la retraite, ils développent des maladies qu’ils n’avaient pas lorsqu’ils étaient en activité. C’est le diagnostic du gériatre et gérontologue, Dr Louis Sylvain Ouédraogo. Pour lui, la période de retraite dite de repos est « une très mauvaise période pour les personnes âgées ».
Le gériatre prévient que « la première maladie qu’ils peuvent développer, c’est l’hypertension. Souvent le diabète s’y associe« . En plus de cela, il note que toutes les affections articulaires, c’est-à-dire les douleurs osseuses, surviennent lorsque l’on est inactif. Sur la base de son expérience, il ajoute que certains retraités développent la dépression à cause de l’impréparation à la retraite.
Géomètre à la retraite depuis plus de 10 ans, Yé, 73 ans, rencontré à la Maison du retraité Antoine Nanga à Ouagadougou relève l’importance des suivis sanitaires. « S’il y a quelque chose, on y prend garde. Si on dit de ne pas boire la bière ou ceci ou cela, c’est une contrainte, c’est pour la longévité. Ceux qui outrepassent ce que disent les médecins, ça les regarde », tranche-t-il.
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De son point de vue, les visites médicales organisées par la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) et la Caisse autonome de Retraite des Fonctionnaires (CARFO), « pour des personnes qui ont rendu service à la Nation, c’est une bonne chose. Il ne faut pas les laisser au dépotoir ». Il estime que la visite médicale en dehors de celle organisée au profit des retraités est un luxe, car il faut avoir les moyens pour chaque année faire un bilan de santé.
Il est rejoint par El hadj Sanfo, agent du Fisc à la retraite depuis 16 ans. Pour lui également, les contrôles sanitaires sont importants : « Quand on arrive à 60 ans, on n’a plus les mêmes vigueurs. Et quel que soit votre état de santé, il faut des médicaments pour essayer d’équilibrer. On appelle ça des réparations ». Toutefois le retraité pointe du doigt des insuffisances. « Les visites sont incomplètes. L’intention est bonne parce qu’on va découvrir votre maladie, mais on ne va pas vous soigner, on ne va pas vous donner les moyens. Il y a certains, c’est mieux même qu’ils ne sachent pas qu’ils sont malades », regrette-t-il.
Yé est du même avis, mais reconnaît que les résultats de la visite médicale sont déjà une bonne base qu’il faut, de son avis, approfondir. « En attendant tu as au moins l’état de ta santé », se console-t-il.
Quand la situation sécurité s’invite dans la visite médicale des retraités
Des plaintes légitimes, semble reconnaître le directeur de la Prévention et de l’Action sociale et sanitaire de la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS), François d’Assise Sawadogo. Par contre, il rassure que le problème est connu et que des réflexions ont été menées. A l’issue, du reste, « il y a une amélioration, il y a un bon de médicaments », confie-t-il.
Il raconte qu’« avant, c’était la mise à disposition de médicaments sur place dont la valeur ne dépassait pas 1000 ou 1500 F CFA. Mais maintenant, on s’est dit qu’il faut tenir compte de l’état du retraité, d’où l’introduction du bon de médicaments d’une valeur de 5000 F CFA. Avec ce bon, le retraité va à la pharmacie de son choix » et complète de sa poche si le prix médicament prescrit est au dessous de 5000 F CFA. Foi de François d’Assise Sawadogo, cette mesure coûte à l’Etat environ 1 700 000 000 de FCFA pour l’ensemble des 95 000 retraités du pays, dont 59 000 à peu près pour la CNSS.
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François d’Assise relève que la visite médicale des retraités prend en compte des examens de laboratoire, en premier. Ensuite le retraité se présente devant un médecin avec les résultats de ses examens. L’agent de santé jugera s’il y a lieu de prescrire des médicaments ou pas. Aussi, il fait savoir que ces visites médicales prennent également en charge les conjointes ou conjoints des retraités. Ce, suite à la présentation de la carte de retraité.
Le directeur de la Prévention et de l’Action sociale et sanitaire de la CNSS regrette la situation sécuritaire du Burkina Faso qui influe sur la visite médicale des retraités. « C’est un élément qu’on ne doit pas négliger. Il y a des zones pour y accéder, ce n’est pas simple. La visite médicale à Diapaga, ce n’est évident. Tout comme à Pama ou Bogandé. Même pour se regrouper, ce n’est pas évident », soupire-t-il.
Les retraités de la CNSS ont commencé à bénéficier de la visite médicale en 2007 et ceux de la CARFO à partir de 2009.
Boureima Dembélé