Au Burkina Faso, de plus en plus de ménages et d’entrepreneurs optent pour l’énergie solaire. Objectif, faire face à l’absence ou aux coupures d’électricité et aux factures élevées. Malgré le coût élevé des installations, l’énergie solaire compte plusieurs avantages.
Au quartier Nagrin de Ouagadougou, deux ampoules éclairent le salon de coiffure de Idrissa Ouédraogo. Un ventilateur au plafond tourne, provoquant un léger bruit. Ce n’est pas de l’électricité fournie par le réseau électrique de la Société nationale burkinabè d’électricité (SONABEL) qui alimente cet équipement. Il s’agit simplement d’une petite batterie posée à même le sol. Cette batterie est alimentée par une plaque solaire placée sur le toit. Depuis quatre ans maintenant, Idrissa Ouédraogo travaille avec cette énergie.
Malgré l’arrivée de l’électricité de la SONABEL dans cette zone dite non lotie, cela ne l’a pas empêché de continuer à utiliser l’énergie solaire. « Il suffit qu’il y ait un peu de soleil et je peux travailler toute la journée », explique tout sourire Idrissa Ouédraogo après avoir fini de coiffer un jeune garçon.
Pour Idrissa Ouédraogo, les avantages du solaire sont évidents. En pleine journée, même en cas de délestage, son travail n’est jamais interrompu. Pourtant, en période chaude, certains Burkinabè souffrent souvent des fréquents délestages de la SONABEL. Ces délestages peuvent durer plusieurs heures voire une demi-journée. « Avec les plaques solaires, c’est moins cher qu’avec le courant habituel. Vous voyez la petite batterie qui est là», poursuit-il en désignant la batterie posée à l’entrée du salon, « je peux passer une année sans changer de batterie », ajoute-t-il.
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Cette batterie, Idrissa l’a achetée à onze mille francs CFA. « Je peux faire une année sans changer de batterie », assure-t-il visiblement satisfait. Toutefois, avec l’arrivée de l’électricité classique de la SONABEL, Idrissa Ouédraogo s’est connecté. En effet, Idrissa ne paie que 2000 francs CFA de facture d’électricité par mois, un montant dérisoire comparé au coût élevé de l’électricité au Burkina Faso.
Comme lui, de nombreux petits entrepreneurs à Ouagadougou se tournent vers cette alternative durable. Seydou Kiendrébéogo, un boutiquier du même quartier ne jure que par les plaques solaires. Dans sa boutique également, deux ventilateurs brassent l’air au-dessus de sa tête tandis qu’une grosse batterie posée sur une planche alimente tout son dispositif électrique. Depuis 2014, Seydou Kiendrébéogo utilise les plaques solaires pour alimenter sa boutique.
« Que ce soit avec les ventilateurs, la télé, les ampoules, tout fonctionne ici avec les plaques solaires », dit-il en toute fierté. Pour ce commerçant, il n’y a pas de comparaison possible. L’électricité est arrivée il y a seulement deux ans dans son quartier. Mais, il n’a pas abandonné le solaire. « J’ai installé l’électricité mais ce n’est qu’avec les plaques solaires que je travaille. Nous ne travaillons pas beaucoup avec l’électricité de la SONABEL », affirme-t-il fièrement. Son installation lui suffit déjà largement.
Des économies d’argent
La principale motivation derrière l’adoption du solaire reste la réduction des coûts. Seydou en est convaincu : « Je fais moins de dépenses avec le solaire. Depuis 2014, j’ai changé mes batteries deux fois, et à chaque fois, cela m’a coûté environ 100 000 francs CFA. Mais en contrepartie, je n’ai pratiquement pas de factures d’électricité ». De quoi ne pas hésiter.
A Kamboissin à la résidence des Zerbo, le dispositif électrique fonctionne en alternance entre l’énergie solaire et l’électricité de la SONABEL. Sur le toit de cette maison d’un étage, plusieurs plaques solaires sont visibles. Elles alimentent des batteries rangées dans une maisonnette à l’écart. « Quand on a emménagé ici, il n’y avait pas de courant. Alors, on a opté pour le solaire. Maintenant, même si l’électricité est arrivée, nous continuons d’utiliser les plaques solaires en journée et l’électricité la nuit », fait-il remarquer.
Dans cette famille, plusieurs matériels fonctionnent grâce au solaire. Plusieurs réfrigérateurs, trois climatiseurs, les ventilateurs de toutes les chambres sont connectés au solaire. C’est uniquement la nuit, quand le soleil s’est couché que les Zerbo utilisent l’électricité. Les avantages sont nombreux selon lui : « Les coupures d’électricité ne nous affectent plus. Avec le solaire, la facture de la SONABEL a considérablement baissé. Avant, on consommait 20 000 francs CFA de cash power pour trois jours, maintenant, avec le solaire, on peut tenir une semaine ».
Rentable, mais coûteux à l’installation
« Mais avec la plaque solaire, on ne ressent pas le coût de la facture de l’électricité. Par exemple, si on utilise uniquement l’électricité de la SONABEL nous dépensons 20 mille francs pour seulement trois jours. Mais en complétant avec l’énergie solaire. Cela peut faire au moins une semaine », insiste-t-il.
Toutefois, l’installation initiale peut représenter un frein pour de nombreux ménages. Il faut dépenser souvent plusieurs millions. « Le problème se trouve au niveau des batteries. Elles coûtent cher. Nous avons investi 250 000 francs CFA pour une batterie, et il en faut plusieurs pour un système complet. Mais, sur le long terme, c’est rentable », admet Zerbo. Sa famille a installé une douzaine de batteries pour couvrir le besoin.
Amadé Ouédraogo, électricien spécialiste du solaire illustre cela par son propre exemple. Dans sa résidence à Kamboinsin, une dizaine de réfrigérateurs permet de produit de la glace à partir uniquement du soleil. Il compte près de 40 plaques solaires dont un groupe forme un hangar.
Le reste est sous le toit. De la sorte, Amadé alimente en électricité sa maison qui compte trois climatiseurs, plusieurs réfrigérateurs pour la confection de glace. Sans compter les autres appareils. Cette énergie alimente également un château d’eau. Son atelier de soudure et son entreprise sont alimentés par le même dispositif. Parfois, il revend même de l’électricité aux voisins.
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Il reconnaît que l’investissement initial est élevé mais insiste sur les économies à long terme. « Lorsque vous réussissez l’installation il y a un grand retour sur investissements. A la longue, vous ne payez plus rien. A partir de deux ou trois ans, vous allez vous rendre compte que vous avez fait des économies », précise-t-il.
Amadé Ouédraogo va plus loin. Il constate qu’au Burkina Faso, cette ressource naturelle n’est pas suffisamment exploitée. « Le Burkina a un énorme potentiel solaire qui n’est pas encore pleinement exploité. Si on met en place des systèmes solaires pour chaque quartier, on pourrait même réinjecter de l’électricité dans le réseau de la SONABEL », préconise-t-il.
Si l’installation peut être onéreuse, son entretien par contre, est simple. Mais tous rassurent. Il n’y a aucun frais supplémentaire pour l’entretien. « Il suffit juste de nettoyer les plaques solaires. Quand il y a trop de poussière, vous nettoyez une fois par semaine sinon, une fois par mois », conseille le spécialiste. Pour lui, avec une température avoisinant les 40 degrés en période de chaleur au Burkina Faso l’utilisation de l’énergie solaire est indispensable.
Boukari Ouédraogo