Au Burkina Faso, des milliers de personnes souffrent en silence des maladies tropicales négligées. Ce sont des pathologies moins médiatisées, mais qui rôdent autour des populations, généralement pauvres et en manque d’accès aux soins. Elles frappent les plus vulnérables, déforment les corps, isolent, paralysent et rendent aveugles.
David Kienouri est un jeune qui vit dans la ville de Dédougou, région de la boucle du Mouhoun. Son pied droit enflé limite ses mouvements. Chaque pas est un supplice pour le jeune homme. David vit avec la filariose lymphatique, une maladie tropicale négligée. Chaque jour est un combat pour lui. Pourtant, il se rappelle que c’est une maladie qui a commencé de façon fortuite.
« La maladie a commencé vers l’âge de 10 ans. D’abord, des démangeaisons, puis des épisodes de fièvre, et ensuite le pied qui s’enfle. Parfois, ça disparaît, mais ça revient sans prévenir », se souvient David.
Malgré le temps passé, le jeune homme se demande encore quelle est l’origine de ce mal qui le ronge au quotidien. « Quand ça arrive, je ne peux presque plus rien faire. Certains disent que c’est dans l’eau, d’autres parlent de l’air ou de la saleté… Moi, je ne sais pas », lance le patient, visiblement impuissant, désemparé.
Un mal silencieux qui handicape des vies
David n’est pas seul dans ce cas. Au Burkina, des milliers de patients trainent avec des maladies tropicales négligées. Ils souffrent souvent en silence, faute d’accès aux soins. Peu médiatisées, elles constituent quand même un problème majeur de santé.
Selon le Dr Karim Kombasséré, spécialiste en santé communautaire, les maladies tropicales négligées sont des pathologies infectieuses qui sont répandues dans les régions tropicales et subtropicales. « Elles touchent plus d’un milliard de personnes dans le monde, dont 40 % en Afrique. Elles sont dites négligées parce qu’elles n’ont pas la même attention que les autres maladies », explique-t-il.
Il ajoute que l’Organisation mondiale de la santé a répertorié 17 maladies tropicales négligées dans le monde. Au Burkina Faso, par exemple, la dengue, la bilharziose, le ver de Guinée, la lèpre, la rage, le trachome, le ténia… sont comptabilisées comme des maladies tropicales négligées.
Pour une thérapie de choc
Toutefois, il est bien possible de venir à bout de ces rongeuses silencieuses. Pour réduire leur impact, il est important d’améliorer le diagnostic, de faciliter l’accès au traitement et de renforcer la prévention.
« Il faut vraiment renforcer le système de santé au niveau local pour renforcer la prise en charge. Il y a aussi la formation des agents de santé à la prise en charge de ces maladies et faire en sorte que les programmes qui interviennent au niveau national soient décentralisés au niveau périphérique », prescrit le spécialiste en santé communautaire.
En outre, le spécialiste évoque la chimio-prévention avec la distribution en masse de médicaments comme l’albendazole ou l’ivermectine. « Cela a permis au Burkina Faso de réduire significativement l’impact et la survenue de ces maladies », se réjouit-il.
Il faut renforcer la sensibilisation auprès des populations, surtout vulnérables. Mais, pour David Kienouri, cela ne suffira pas tant que la population n’aura pas le réflexe d’aller en consultation le plus tôt possible pour éviter toute complication et permettre une prise en charge rapide.
Aimé Ouédraogo