Le polpogué est une spécialité culinaire de Koupéla (province du Kouritenga), ville à 140 km de Ouagadougou. Il s’agit de la soupe de carcasse entière de ruminant sans huile, tomates et oignons. Cette spécialité est ancrée dans les valeurs traditionnelles locales.
Ce samedi, jour de repos, les enseignants organisent une fête. Au menu, le polpogué, un repas traditionnel spécialité de la localité. Dans cette ville, toutes les grandes réjouissances sont marquées par la dégustation du polpogué. De quoi s’agit-il exactement ? De la soupe de carcasse de mouton. Presque rien n’est épargné à la cuisson : la tête, les pattes, la chair, les intestins.
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A la cuisine, c’est un homme qui tient la louche. Pourtant, dans la communauté moagha, la cuisine est réservée aux femmes. En général, les hommes n’ont pas le droit de s’y approcher. Un homme qui fait la cuisine est mal vu dans la société. Mais, pour ce qui concerne le polpogué, c’est bien une affaire d’hommes. Abdoul Naré, est considéré comme l’un des plus grands spécialistes en matière dans la ville.
Une bonne hygiène
L’homme s’affaire devant sa marmite, tandis que des femmes et des jeunes filles défilent aux alentours sans y mettre la main. Pour commencer, il dépose une grosse marmite sur le feu. Abdoul Naré y ajoute de l’eau et du sel sous un feu de bois. « Mais, prévient-il, c’est habituellement avec une marmite en terre cuite qu’il faut préparer le polpolgué afin de garder toute la saveur des ingrédients et de la viande ».
Une fois le feu allumé, Abdou lave proprement sa carcasse. L’hygiène est très importante. « Il faut laver la carcasse trois fois pour que ce soit bien propre avant de mettre la viande dans la marmite », poursuit le cuisinier en chef. Il commence d’abord par mettre la tête de mouton qu’il laisse bouillir dans la marmite. Quelques minutes après, il y ajoute la viande puis les intestins. « La tête prend plus de temps pour cuir. Il faut commencer par ça d’abord », souligne-t-il.
Il laisse mijoter pendant près de 45 minutes avant de renverser le tout dans un gros plat. C’est à ce moment que Abdoul Naré se met à couper la viande en petit morceau et renverse dans la marmite de nouveau. Puis, place à la deuxième cuisson. Cette fois, le chef cuisinier ajoute des épices. De l’ail, du soumbala, des poivrons. « Mais on ne met pas d’huile, ni de tomates encore moins des oignons », prévient Abdoul Naré. Temps de cuisson, deux heures environs. Depuis un certain temps, les femmes se sont mises à la préparation du polpogué pour des raisons économiques surtout. « Mais si vous goutez ma spécialité et vous goutez ce que les femmes font, vous verrez la différence sans me vanter », dit-il fièrement.
Une saveur naturelle
Josiane Somé, installé à Koupéla depuis une dizaine d’années apprécie bien le polpogué. Dès sa première dégustation, elle a perçu la différence. « Ma première fois de voir ça, je pensais que c’était une soupe comme les autres (…) La première fois que j’ai bu la soupe, j’ai constaté que c’est différent des autres », apprécie la jeune dame.
Sambo Sandwidi lui connaît très bien le goût du popolgué qu’il consomme depuis son enfance. « C’est un plat naturel. Quand vous consommez, vous sentez toute la saveur de la viande et des épices, souligne-t-il puis de poursuivre, lors de nos travaux champêtres, les cérémonies et autres, on en consomme ».
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Cette recette est vendue sur la place du marché à Koupéla. Mais, le commerce est en train de disparaitre du fait de la cherté de la vie. « Payer un animal à 45 mille francs CFA pour faire le polpolgué, c’est pas simple. Voilà pourquoi, c’est réservé désormais lors des fêtes coutumières ou lorsqu’on a des cérémonies ». Pour cette raison, Josiane n’a pas encore expérimenté cette cuisine. « C’est vraiment cher », admet-elle.
Le polpogué commence à s’exporter hors des frontières de la province du Kouritenga. Lors de certains évènements à caractère international, des gens comme Abdoul Naré sont invités à préparer ce met traditionnel encore peu connu dans le pays.
Boukari Ouédraogo