33 ans après l’assassinat du Capitaine président Thomas Sankara, des jeunes burkinabè parlent de lui avec passion, alors qu’ils ne l’ont pas connu. Ce qui leur sert de guide : les actions du leader de la révolution burkinabè, ses discours, les témoignages et ses idées qu’ils jugent intemporelles.
Quand le 15 octobre 1987 Thomas Sankara est assassiné, Madi Pingdwendé Kima, n’était pas née. C’est une année après qu’il naquit. Mais 33 ans après, sous le soleil ardent de la capitale, le jeune homme entame une procession allant du conseil de l’entente, là où le Capitaine président est tombé avec ses 12 compagnons, jusqu’au tribunal militaire. Ils sont exactement 33 personnes à marcher (pour symboliser les 33 ans) dont des jeunes, en cette date anniversaire, photos géantes des disparus en main. Madi Pingdwendé Kima, 32 ans bat ainsi le pavée, pour dit-il, exiger vérité et justice pour son idole. « Je peux dire que Sankara était un prophète. Il a eu des paroles prophétiques et messianiques, tout ce qu’il avait dit à l’époque c’est toujours d’actualité. Ce qui inspire la jeunesse c’est que Sankara est un homme qui s’est battu pour le développement, l’indépendance vraie de son pays », explique le marcheur. Il n’a certes pas connu Thomas Sankara de son vivant mais, précise-il, quand on aime quelqu’un on se donne la peine d’en savoir davantage sur lui, même s’il est mort. « En tant que jeune, je n’ai pas connu Sankara, mais à travers les documents et les témoignages des anciens, nous savons que cet homme-là, c’est un phare pour la jeunesse », se convainc Madi Pingdwendé.
Comme lui, Idrissa Touré 23 ans, trouve dans la vie et les actions du Capitaine président, des sillons tracés pour se forger et être utile à sa communauté. « Il avait une vision claire de ce qu’il voulait pour ce pays. Son amour pour son peuple n’avait pas d’égal. C’est pour cela que je l’aime. Il s’est sacrifié pour tout le monde. Il ne s’est battu pas pour lui-même, sa famille et ses proches, mais pour le bien de tout le monde. C’était un panafricaniste. C’était un président pour le Burkina et pour l’Afrique toute entière », exprime le jeune étudiant en première année linguistique, le poing droit serré, les yeux écarquillés. Lui également dit avoir appris à connaitre le leader de la révolution d’aout 1983 à travers ses discours, et en regardant des documentaires sur son idole. « Ces idéaux m’inspirent tous les jours », affirme Idrissa Touré.
Plusieurs jeunes qui n’ont connu la période révolutionnaire, vouent de l’admiration pour le Capitaine Thomas Sankara. Selon le secrétaire général du mémorial Thomas Sankara, c’est parce que les idées du défunt président traversent le temps et sont d’actualité. « N’importe quel jeune qui découvrira Sankara va l’aimer. Que ce soit maintenant ou plus tard (…) Sankara marque son époque et devient immortel parce qu’il a cherché une chose que peu de président cherche : le bonheur de son peuple, avec tout le sacrifice possible, en s’oubliant lui-même jusqu’au sacrifice suprême. En acceptant de mourir pour que continuent de survivre ses idées. C’est un héros, un patriote sincère, un visionnaire qui a aimé son peuple et l’Afrique entière », s’épanche Youlouka Luc Damiba.
Ironie du sort, poursuit-il, ceux qui vont juger le dossier « n’était même pas née ou était encore tout petit et ne l’ont pas connu ». Le président Thomas Sankara a été assassiné le 15 octobre 1987 à Ouagadougou, précisément au conseil de l’entente. Après des années d’attente, le dossier pourrait être jugé en 2021. « Le dossier est prêt (…) Il est en train d’être ventilé aux différentes parties dans l’affaire (…) », dit Luc Damiba au sortir d’une entrevue ce 15 octobre avec le directeur de la justice militaire qui a en charge le dossier.